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pas invités ! Eh bien ! Il faut lui enlever son cochon et le manger sans lui. » La-dessus les fripons arrangèrent leur complot, et en attendant que la nuit vînt leur permettre de l’exécuter, ils allèrent se cacher dans le voisinage derrière une haie.

Le soir, quand Travers rentra, sa femme lui parla de la visite qu’elle avait reçue. « J’ai eu si peur de me trouver seule avec eux, dit-elle, ils avaient si mauvaise mine, que je n’ai osé leur demander ni leur nom ni pourquoi ils venaient. Mais leurs yeux ont fureté partout, et je ne crois pas qu’il y ait ici un clou qui leur ait échappé. — Ah ! ce sont mes deux drôles, s’écria douloureusement Travers, mon cochon est perdu ; c’est une affaire faite, et je voudrais à présent pour bien des choses l’avoir vendu. Il y a encore un moyen, dit la femme : ôtons-le de sa place et cachons-le quelque part pour la nuit. Demain, quand il fera jour, nous verrons quel parti prendre. » Travers suivit le conseil de sa femme. Il décrocha le cochon, et alla le mettre par terre à l’autre bout de la chambre, sous la huche qui servait à pétrir leur pain : après quoi il se coucha, mais non sans inquiétudes.

La nuit venue, les deux frères arrivent pour accomplir leur projet et tandis que l’aîné fait le guet, Barat commence à percer le mur à l’endroit où il avait vu le cochon suspendu. Mais bientôt il s’aperçoit qu’il n’y a plus que la corde. « L’oiseau est déniché, dit-il, nous venons trop tard. » Travers, que la crainte d’être volé tenait en alarme et empêchait de dormir, croyant entendre quelque bruit, réveilla sa femme et courut à la huche tâter si son cochon y était encore. Il l’y trouva, mais comme il craignait aussi pour sa grange