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reposer et y passer la nuit. » Aussitôt il descendit de cheval : mais sa joie était si grande et sa précipitation fut telle, qu’il se laissa tomber et se démit l’épaule. Quoique blessé, il put néanmoins attacher avec l’autre main son cheval à un arbre. Ensuite il entra dans la loge, et, sans songer à ce qu’il souffrait, il s’écria, transporté d’amour : « Belles fleurs, rameaux verts qu’a cueillis ma Nicolette, si j’avais auprès de moi ma douce amie, ah ! que de douces paroles je lui dirais ! »

La fillette était tout près de là qui l’entendait. Elle courut à lui les bras ouverts et l’embrassa tendrement. « Beau doux ami, je vous ai donc retrouvé ! » Et lui de la serrer à son tour dans les siens et de l’embrasser mille fois. « Ah ! belle amie, tout à l’heure je souffrais beaucoup, mais à présent que je vous tiens, je ne sens plus de mal. » Nicolette alarmée l’interrogea sur la cause de ses douleurs ; elle lui tâta l’épaule pour s’assurer si elle était déboîtée, et avec l’aide du ciel, elle fit si bien qu’elle réussit à la remettre en place. Sa main ensuite appliqua sur le mal certaines fleurs et plantes salutaires dont la vertu lui était connue, et elle les y assujettit avec un peu de sa robe qu’elle déchira.

Quand il fut pansé : « Beau doux ami, dit-elle, quel parti maintenant allons-nous prendre ? Votre père, instruit de votre fuite, va, dès le point du jour, n’en doutez pas, envoyer après vous et faire fouiller cette forêt. Si l’on vous trouve, j’ignore ce qui vous arrivera ; mais moi, je sais bien qu’on me fera mourir cruellement. — J’y mettrai bon ordre, » répondit le damoiseau. Il monta aussitôt sur son cheval, prit sa mie dans ses