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CHAPITRE II

Pie IX prêtre.


Dans l’humble chapelle de Sainte-Anne des Menuisiers, le jour de Pâques, 1819, l’abbé Mastaï célébra la sainte messe pour la première fois.

Le jeune prêtre se distingua bientôt parmi la jeunesse studieuse qui se réunissait souvent au collège romain pour de nobles exercices intellectuels. « L’abbé Mastaï, dit un auteur italien[1], était l’âme de ces douces réunions. Nous restions suspendus à ses lèvres ; il nous ravissait par le goût et l’entrain de ses compositions. »

Nommé recteur de l’hospice si populaire de Tata Giovani, (père Jean) fondé vers la fin du siècle dernier par un brave ouvrier romain, Jean Borghi, l’abbé Mastaï se livra avec un zèle remarquable pendant sept ans aux rudes travaux que lui imposait cette charge. Il habitait au milieu des orphelins qu’il ne se contentait pas d’instruire et de conduire dans la voie de la vertu mais qu’il soutenait souvent de ses propres deniers. Devenu le chef de l’Église, il conserva un tendre souvenir de son hospice et de ses orphelins. On raconte qu’un jour, en 1871, il disait à un joaillier de Rome, présent à une audience : « Je vous ai toujours su gré d’avoir pris, parmi vos ouvriers, des enfants de Tata Giovani. En avez-vous encore que j’aie connus ? » Et comme le joaillier hésitait, — vous devez avoir un tel ? reprit Pie IX. — Oui Saint-Père. — « Êtes-vous content de lui ? A-t-il des enfants ? Se trouve-t-il à l’aise ? » Puis le Saint-Père raconte à l’auditoire étonné des incidents se rapportant à l’enfance de cet ouvrier auquel il avait enseigné le catéchisme cinquante années auparavant.

À l’âge de trente ans, l’abbé Mastaï fut nommé auditeur de Mgr Muri, nonce du Pape, qui partait pour le Chili. La pensée de ce lointain voyage effraya la comtesse Mastaï. « Écrivez à votre mère, dit Pie VII, que vous reviendriez sain et sauf. » Pour la seconde fois, le saint vieillard se montrait prophète.

En partant de Rome, l’abbé Mastaï laissa dans le deuil l’hospice de Tata Giovani ; ses petits orphelins lui firent des adieux déchirants. « Non jamais, s’écria-t-il, jamais je n’aurais cru que la séparation pût être aussi douloureuse. »

  1. Francesco Massi.