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POUR LA PATRIE

que vous tardiez un peu, je craignais d’être privé du plaisir de votre compagnie ce soir. Sans doute, vous ne pensez pas comme moi sur une foule de questions, mais j’aime le talent et les convictions partout où je les trouve. Tous deux vous pensez fortement et vous exprimez vos pensées avec énergie et originalité. C’est assez pour que je vous admire.

— Le talent est sans doute admirable quand il est employé pour le bien, dit Lamirande ; mais doit-on l’admirer quand il se consacre au mal ?

— Le talent, l’intelligence, cher monsieur, c’est toujours chose digne d’admiration, parce que c’est un don de l’Être Suprême, une parcelle de l’âme universelle.

— Dans l’intelligence humaine il faut, ce me semble, considérer deux choses : l’œuvre de Dieu qui est toujours belle, et l’œuvre de l’homme, c’est-à-dire l’usage que l’homme fait de ses facultés. Malheureusement, cette dernière œuvre est souvent mauvaise et laide.

— Voilà que vous vous lancez dans les régions de la haute philosophie. Vous planez ; mes pauvres vieilles ailes ne me permettent pas de vous suivre. Je me contente de vous admirer.