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POUR LA PATRIE

— Ah ! mon fils, poursuivit le vieillard, comme s’il parlait à lui-même, je ne le maudis pas, car s’il est mauvais aujourd’hui, c’est ma faute. Je l’ai élevé sans correction, j’ai laissé ses caprices, ses funestes penchants grandir avec lui. Il me semblait que c’était là de l’amour paternel. Aujourd’hui je vois ma folie. Il m’a ruiné. Puis il a quitté la France, il y a bien des années. Je ne savais pas où il était, car il ne m’écrivait jamais. Ce fut par hasard que je vis, dans un journal canadien, qu’il était établi à Québec, qu’il était riche. Je l’aimais toujours, et résolus de venir le retrouver, car j’étais si seul. Ah ! que ne suis-je resté là-bas dans ma solitude. J’étais pauvre, j’avais du chagrin en pensant à mon fils absent ; mais au moins je n’avais pas le cœur brisé comme il l’est aujourd’hui… J’avais juste assez de petites économies pour payer mon passage à Québec. En arrivant ici je me suis rendu tout droit chez mon fils…

La voix du vieillard s’étouffa dans les sanglots. Après quelques instants, il continua :

— Le malheureux ! il ne voulut pas reconnaître son père ! Il me traita d’imposteur, me mit à la porte de sa maison et me dit, avec