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POUR LA PATRIE

jamais éprouvé au-dessus de ses forces, il aurait pu résister à ce redoutable assaut, s’il eût suivi le sage conseil de son véritable ami : une courte et fervente prière, un seul cri de détresse vers le Cœur de Jésus, et il était sauvé.

Lorsque les disciples allaient être engloutis par les vagues, ce fut une prière de quatre mots qui écarta le danger : Domine, salva nos, perimus !

Mais un mouvement d’orgueil étouffa ce cri qui montait déjà à ses lèvres. C’était une dernière grâce qu’il repoussait.

En quittant Lamirande, il était entièrement sous l’empire du Tentateur. Une rage étrange contre tous ses anciens amis, et particulièrement contre le meilleur de tous, s’était emparée de son âme. Autant il estimait et admirait jadis le jeune député, autant maintenant il le détestait. Auparavant, même au milieu de ses faiblesses et de ses misères, il aurait voulu imiter les vertus de Lamirande, posséder son désintéressement, sa force de caractère. Ces salutaires aspirations s’étaient subitement changées en une jalousie atroce et cruelle. Trop lâche pour s’élever jusqu’aux hauteurs où se tenait son ancien ami, il aurait