Page:Tardivel - Mélanges, Tome I, 1887.djvu/68

Cette page a été validée par deux contributeurs.
71
OU RECUEIL D’ÉTUDES

Certes, oui. C’est même un devoir pour l’homme de faire fructifier la terre, de la subjuguer, d’exploiter les richesses que la Providence a mises à sa disposition ; à la condition qu’il ne perde pas de vue sa fin dernière et qu’il ne travaille jamais pour le temps mais toujours pour l’éternité.

Mais au point de vue purement matériel, il nous semble que nos réformateurs n’ont pas une idée bien claire de ce qu’il faut entendre par une éducation pratique. Ils voudraient couler tout le monde dans un moule unique, bourrer tous les enfants d’Adam de chiffres, de comptabilité et de génie civil. Et ils appellent cela pratique, mais c’est tout simplement insensé.

Sans doute, il faut des teneurs de livres, des négociants, et des ingénieurs civils ; il faut des écoles spéciales pour les préparer à ces carrières. Qu’on en crée, au lieu d’intriguer pour les empêcher de se fonder, comme cela a eu lieu à Québec, il n’y a pas encore un siècle.

Mais il faut autre chose aussi. Prétend-on sérieusement que ce régime de chiffres et de dessin linéaire convienne à tout le monde ?

Qu’on enseigne bien à chacun son métier ou sa profession, que chacun apprenne ce qu’il doit apprendre et notre éducation sera pratique. Aux cultivateurs, l’agriculture ; aux artisans, la mécanique ; aux marchands, la comptabilité ; aux avocats, le droit ; à tous le catéchisme. Et laissez-nous en paix avec vos chiffres mis à toutes les sauces.

La géométrie est une belle science, mais elle n’est pas pratique pour tout le monde.

Par exemple, elle n’aiderait guère les Esquimaux à prendre le loup-marin.

Nous reviendrons encore sur cette question.


11 février 1882


Nous interrompons le cours de nos articles pour contempler un instant, en passant, la figure d’un brave