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OU RECUEIL D’ÉTUDES

Or, est-il raisonnable de supposer qu’avec une telle aversion pour la taxe et une indifférence coupable pour l’éducation de leurs enfants, les contribuables d’une localité choisissent des hommes pour commissaires d’école dont le dévouement et le zèle sont reconnus pour la promotion de l’éducation dans la paroisse ou la municipalité ? Non, on choisira, presque dans tous les cas, des hommes illettrés et étant d’une grande hostilité à la taxe d’école. Cependant je ne pense pas qu’il y ait de pays civilisé au monde, autre que la province de Québec, où l’on dépense si peu pour l’instruction primaire. Je sais que chez les Esquimaux on ne paie aucune taxe quelconque, pas même la taxe scolaire, mais faut voir aussi comme cette nation est civilisée ! Je dirai plus. Ne semble-t-il pas à tout le monde que c’est une grande anomalie de faire administrer une loi importante, comme celle de l’instruction publique, en ce qui concerne nos écoles primaires, par des hommes qui, pour la plupart, n’en comprennent pas le premier mot et à qui on donne des pouvoirs limités pour tout ce qui a rapport au soutien et au nombre des écoles qui devraient être en opération dans la municipalité et à l’engagement des instituteurs ? Ne vaudrait-il pas mieux laisser au surintendant de l’instruction publique et partant à ses députés, les inspecteurs, tous les pouvoirs nécessaires pour faire exécuter la loi dans le vrai sens du statut, et enlever les mêmes pouvoirs à ceux qui le possèdent actuellement ? C’est ce que je me propose de démontrer plus loin…

« Il faut instruire le peuple même malgré lui, si c’est nécessaire : c’est là la pierre philosophale de l’avenir de notre province. »

Ne parlons pas de la forme littéraire de cette correspondance ; elle est raboteuse au suprême degré, surtout si nous tenons compte du sujet que l’on prétend y traiter. Avouons, toutefois, qu’un écrit en beau français, dans les colonnes de la Minerve, ne serait pas à sa place. Mais ce qui est grave, c’est le fond, ce qui est dangereux, c’est la doctrine de l’auteur. Le manque d’espace nous empêche de répondre à toutes les erreurs dont cette citation est parsemée ; nous y reviendrons. Pour aujourd’hui nous nous contentons de dire que le projet de M. Rouleau, qui veut centraliser et, partant, laïciser l’instruction primaire, est un projet détestable. Le mot est dur mais il faut bien appeler les choses par leur nom. C’est un projet qu’un