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seraient aussi ridicules que téméraires. Mais il faut savoir ce que l’on entend par « conduire l’Église. »

Les laïques n’ont absolument rien à voir dans l’administration des sacrements, dans les questions de discipline ecclésiastique, encore moins dans la définition des dogmes, c’est-à-dire que les choses qui regardent l’économie intérieure de l’Église ne sont nullement de leur compétence.

Mais l’Église a des rapports constants avec les sociétés civiles ; ses doctrines doivent être la base de l’ordre social ; son enseignement doit pénétrer partout ; ses lois doivent être respectées par tous. Or, les laïques ont, non-seulement le droit, mais le devoir de travailler, dans la mesure de leurs forces et selon les lumières qu’ils ont reçues, à étendre l’influence de l’Église au dehors, à repousser les attaques de ses ennemis, à défendre ses doctrines, à proclamer les principes qu’elle proclame, et à les appliquer partout où il est possible de le faire. Nier ce droit et ce devoir aux laïques, c’est appuyer indirectement l’erreur de ceux qui prétendent que l’église doit être entièrement séparée de l’État, erreur formellement condamnée par Rome.

Dans ce monde, l’homme fait partie de deux sociétés, de la société religieuse, instituée par Dieu pour conduire les âmes au ciel, de la société civile qui a pour mission de travailler au bonheur matériel des peuples et de permettre en même temps aux individus de mieux atteindre leur fin dernière. Ces deux sociétés, quoique très distinctes, viennent nécessairement en contact l’une avec l’autre, mais il ne devrait pas y avoir collision entre elles. Pour qu’il n’y ait pas colision, il faut que l’ordre soit conservé, c’est-à-dire que l’État ne cherche pas à usurper la première place, qui appartient à l’Église à cause de sa fin, infiniment plus noble que la fin de l’État. Pour qu’il y ait harmonie entre les deux sociétés, il faut que les lois qui régissent la société civile soient conformes aux lois qui régissent la société religieuse. Cela étant admis, et il faut l’admettre pour être catholique, il est évident que tout laïque, en tant que membre de la société civile, a le