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propos. Je veux signaler une tendance inconsciente à adopter des tournures étrangères au génie de notre langue, des expressions et des mots impropres ; je veux parler des anglicismes. Il faut bien s’entendre sur la véritable signification de ce mot. On croit trop généralement que les seuls anglicismes que l’on ait à nous reprocher sont ces mots anglais qui s’emploient plus souvent en France qu’au Canada, tels que « steamer », « fair-play », « leader », « bill », « meeting », « square », « dock », etc. À vrai dire ce ne sont pas là des anglicismes, et il n’y a que très peu de danger à faire usage de ces expressions, surtout lorsque le mot français correspondant manque. On peut, sans inconvénient, emprunter à une langue ce qu’il nous faut pour rendre plus facilement notre pensée. Aussi les Anglais ont-ils adopté une foule de mots français ; Naïveté, ennui, sang-froid, sans-gêne, &c.

Voici comment je définis le véritable anglicisme : « Une signification anglaise donnée à un mot français. » Un exemple fera mieux comprendre ma pensée. Ainsi on entend dire tous les jours qu’un tel a fait « application » pour une place. Le mot « application » est français ; il signifie « l’action d’appliquer une chose à une autre » et n’a d’autre signification. On fait « l’application » d’un principe ou d’un cataplasme. Mais on ne peut pas employer ce mot dans le sens de demande et dire : « Faire application pour une place. » C’est de l’anglais : To made application for a place.

Voilà l’anglicisme proprement dit qui nous envahit et qu’il faut combattre à tout prix si nous voulons que notre langue reste véritablement française. Cette