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verons en face d’autres horreurs littéraires : « M. B. va donner une lecture ce soir », ou pis encore, va « lecturer » pour « faire, une conférence, une causerie. » Ce mot lecturer, qui n’est pas même français, s’emploie aussi dans le sens de « censurer », «  réprimander » : « Je ne veux pas me laisser lecturer par vous. »

On peut lire tous les jours dans les informations que « M. Z. est venu à Québec pour transiger des affaires importantes. » Or, transiger signifie simplement, « faire un compromis, faire des concessions. » On transige sur les principes, trop souvent même, mais on fait, on règle des affaires. On parle aussi très-souvent dans les faits divers de la « police montée, » voulant dire par là « la police à cheval, » ou bien de la « police d’eau » au lieu de « la police de la rade. » On dit aussi que « cent passagers sont partis par le chemin de fer du Nord, » au lieu de cent « voyageurs. » On nous dira aussi que « cela regarde mal — looks bad » pour paraît mal, » et il est possible qu’on nous apprenne que « M. Z. regardait pour son garçon dans la cour du voisin — was looking for, » ce qui signifie en français qu’il le cherchait.

En rendant compte d’une soirée, le reporter nous annoncera que « ça été un beau succès, » que « la bande de la Batterie B a bien joué » qu’il y avait une bonne salle » et que « l’audience était distinguée. » Ce qui veut dire que la soirée a eu un beau succès, que le corps de musique a bien joué, que la salle était remplie et que l’auditoire était distingué.

Si maintenant nous abordons les colonnes réservées au rédacteur-en-chef, nous trouverons toutes les locutions vicieuses déjà signalées et d’autres encore.