des applications plus nombreuses au calcul et spécialement à celui des quantités positives et négatives. Dans une société qui se civilise, l’assimilation des individus par imitation rayonnante de modèles communs multiplie les exemplaires de ces éditions imitatives en tout genre d’idée ou d’action, de consommations ou de productions industrielles, littéraires, artistiques ou autres ; de là, inévitablement, l’apparition et le développement de la statistique, cette arithmétique morale. Par la même raison, dans toute société qui s’organise et s’assoit, on voit se préciser et se fixer un taux normal des salaires, un prix normal des produits, un chiffre normal de la population, et aussi bien de la production en tout ordre d’articles. Nous n’en sommes pas là, mais nous gravitons visiblement vers ce niveau d’équilibre, qui sera plus tard le point central d’oscillations symétriques en plus et en moins : ainsi se justifiera de mieux en mieux une sorte d’algèbre morale qui aura à résoudre force problèmes sociaux par le maniement ingénieux de valeurs positives et négatives en sociologie même. — En attendant, c’est en s’appliquant aux sociétés considérées sous leur aspect militaire que les mathématiques trouvent leur emploi sociologique le plus riche et le plus fécond ; et rien de plus aisé à comprendre. L’armée est la partie de la nation où les individus sont le plus près d’avoir perdu tout caractère individuel, réduits à l’état d’unités parfaitement semblables et additionnées ; et la guerre est le plus grandiose des chocs physiques et psychologiques, la plus éclatante des oppositions physiques et psychologiques, qui se voient sous le soleil. Or, précisément, nous l’avons vu plus haut, les mathématiques ont ce caractère essentiel de
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