nous trompent, elles ne nous mentent pas comme la haine et l’envie, et leurs espérances, en tout cas, nous abusent moins que les ambitions belliqueuses. Si toutes les nobles âmes vraiment religieuses qui dorment dans les cimetières pouvaient renaître, est-ce qu’ayant expérimenté par leur sommeil posthume, sans récompense ni châtiment, l’inanité de plusieurs de leurs croyances antérieures, sur lesquelles leur vie a paru se régler, elles changeraient de conduite tout à coup, se repentiraient de leur charité, de leur abnégation, se lanceraient dans une vie de calculs égoïstes et de grossier libertinage ? Non, la plupart d’entre elles se remettraient à faire par amour, par pur amour, ce qu’elles avaient cru faire par désir du salut, et aucune d’elles peut-être ne maudirait son erreur passée. Mais, si ceux qui sont morts vaillamment dans les combats, surtout dans les guerres civiles, les ligueurs, les fanatiques guerriers de tout temps, venaient à ressusciter, combien ne jugeraient-ils pas insensée, en voyant le produit net et définitif de leur héroïsme, la fureur des batailles !
Encore s’il était démontré que le résultat certain ou seulement probable de cet enchaînement de tueries est, finalement, une conquête universelle, suivie d’une nouvelle paix romaine agrandie ! On pardonnerait alors à la guerre, en songeant qu’ayant enfin détruit son propre ouvrage, les murs de clôture hérissés et crénelés entre états, elle a laissé le champ libre au rayonnement imitatif de la sympathie humaine, au principe vraiment civilisateur. Mais non, la paix romaine n’a été due qu’à un concours de circonstances exceptionnelles. L’effet direct, l’enfant légitime de la guerre, ce n’est point un