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dire combien a fait commettre de fautes, en politique, l’erreur vulgaire de penser que la prétendue loi de la réaction égale et contraire à l’action s’y applique. Une affirmation suscite habituellement sa répétition, elle ne suscite que très rarement sa négation, mais, un peu moins rarement, elle la rencontre, chose bien différente. Et de cette rencontre, qui aurait difficilement pu être évitée dans certains cas, facilement dans d’autres, un combat résulte qui se termine par quoi ? Par la synthèse des deux combattantes ? Nullement, mais par la défaite complète ou partielle de l’une d’elles. Défaite partielle et victoire incomplète ont beau se confondre en un traite de paix ; je vois la mutilation réciproque plutôt que conciliation. Il n’y a conciliation vraie, synthèse vraie, que par l’Invention, fille de la paix, qui fait s’embrasser les adversaires en supprimant leur cause de conflit. — Et je dirais volontiers que la série des inventions réussies, imitées, est la série des synthèses de Hegel, si une invention nouvelle n’éliminait ses devancières presque aussi souvent qu’elle les totalise en les étreignant. — Mais ce qu’on ne peut contester à Hegel, c’est que le oui et le non coexistent dans le monde, que toutes les oppositions s’y réalisent et que, si l’on regarde l’Univers comme une réelle Unité, on doit le concevoir comme une somme de contradictions, synthèse d’ailleurs unique et terminale à laquelle rien ne s’oppose. Si, sans aller jusqu’à personnifier l’Univers, on personnifie au moins l’Humanité comme l’a fait Comte, on ne peut que se faire une conception au fond hégélienne de ce Grand fétiche du positivisme. Quoi de plus incohérent, de plus dément, de plus continuellement discordant, que la vie de cet Être majestueux, tissu de batailles, de disputes, de