combats tout intérieurs, livrés et tranchés dans le champ clos du cerveau individuel. Reconnaîtrons-nous le même rôle aux luttes d’individu à individu, ou de groupe d’hommes à groupe d’hommes, qui ont lieu moins souvent, plus visiblement, sous la forme de discussion, de procès, de concurrence, de polémique, de guerre, et qui attendent, pour éclater, que les luttes précédentes soient résolues ?[1] Est-ce
- ↑ Il est évident, en effet, je l’ai expliqué ailleurs, que c’est seulement quand chacun des par leurs a pris parti entre deux modes d’expression que les discussions grammaticales peuvent naître entre eux, — que c’est seulement quand chaque homme a pris parti en religion, en politique, en industrie, eu art, en morale, et a battu en lui-même un adversaire intérieur, qu’il est prêt à se dresser pour combattre un autre homme, délivré comme lui de son propre conflit intime, de son schisme caché.
contiennent une foule d’oppositions vraies. « Un philologue subtil, M. Paul Arkermann, dit Proudhon dans ses Contradictions écononUques, a fait voir, par Texemple du français, que chaque mot d’une langue ayant son contraire, ou, comme dit l’auteur, son antonyme^ le vocabulaire entier pourrait être dis disposé par couples et former un vaste système dualiste (Voyei Dictionnaire des antonymes, Paris, Brockbaus et Avenarius, 1842). » — On peut dire, assurément, et avec plus de vérité, que la langue est la virtualité d’innombrables thèses et antithèses opposables par couples et formées par toutes les propositions formulables auxquelles il est tocgours loisible d’opposer une contradiction. On en peut dire autant de la religion, où tout a été affirmé et nié ; du droit, où abondent les prétentions juridiques diamétralement contraires, et où tout ce qui est ordonné est susceptible d’être défendu, etc. Seulement, prenons bien garde qu’on aurait tort de prêter une importance égale aux choses ainsi opposées symétriquement. Par exemple, dans la langue, je vois bien que le verbe possède les modes par lesquels on affirme ou on nie (indicatif), ainsi (lue ceux par lesquels on ordonne ou on défend (impératif, optatif), et que les idiomes se distinguent d’après leur délicatesse à traduire les degrés de l’affirmation et de la négation, ou de l’ordre et de la défense, ou de la prière de faire et de ne pas faire. Mais l’affirmation dans le langage, dans la religion, dans la science, partout, joue un tout autre rôle que la négation, tandis que souvent, à l’inverse, dans le droit notamment, en morale religieuse, la défense est le fait capital, supérieur à Tordre. — Le subjonctif présente une idée de doute et d’hésitation ; l’état zéro des deux oppositions fondamentales trouve là son expression.