les transformations économiques sont ce qu’il y a de plus téléologique, c’est-à-dire de plus logique, et leur suite comme leur irréversibilité se justifie par là.
Le transformisme économique peut être envisagé par bien des côtés et présenté, par conséquent, autant de séries unilinéaires ou multilinéaires d’états successifs, qui toutes se prêtent à des formules, parmi lesquelles la précédente, relative à l’origine des substances et des forces employées par l’industrie, n’est qu’une des plus singulières de prime abord, mais non assurément des plus exactes ni des plus profondes. On a jugé plus important, mais à tort, je crois, un ordre soi-disant historique de culture des divers terrains, qui a été formulé par Ricardo à son point de vue spécial, et qui peut être étendu à l’industrie tout entière. Cet ordre, qui irait nécessairement des terres les plus fertiles aux moins fertiles, serait irréversible. Après avoir été longtemps répétée comme un dogme, cette prétendue loi a été contredite par Carey, suivant qui c’est dans l’ordre précisément inverse qu’aurait lieu le défrichement des terres, les plus fertiles étant au début, comme le dit M. Gide, « celles qui, en raison même de leur fécondité sont les plus difficiles à défricher : végétation exubérante, forêts gigantesques, marais, miasmes et fièvres. » En réalité, Ricardo et Carey ont tort et raison à la fois, tous deux conformément à la loi du moindre effort et du plus grand effet ; mais l’ordre indiqué par Carey se vérifie plutôt dans les pays neufs, celui de Ricardo dans les vieux continents. Est-ce à dire qu’il y ait là opposition sérielle ? Non, ni l’une ni l’autre de ces deux formules ne s’applique avec un degré notable d’approximation, et le problème est plus complexe qu’elles ne le laissent