Page:Tarde - L’Opposition universelle, Alcan, 1897.djvu/290

Cette page n’a pas encore été corrigée

l’intelligence n’intervient que comme un élément subsidiaire de distinction. M. Paulhan classe tous les types psychiques d’après leur nature et leur degré de cohésion systématique… Mais je ne veux pas discuter ces classements, tous excellents à certains égards, et je me borne à indiquer leur multiformité, que je vais accroître en osant proposer à mon tour, en quelques mots, une classification différente, peut-être assez propre à s’assimiler ce que les précédentes ont de plus réel et de plus vrai.

Il convient de distinguer les personnes d’après leur manière de croire et leur manière de désirer. Voilà la grande division. Quant à la manière de sentir, elle ne saurait être mise sur le même rang, car elle dérive en partie des deux autres, la sensation et le sentiment étant partiellement composés de jugements et de désirs. Nous y reviendrons. Par manière de croire, il faut entendre une prédisposition à l’énergie ou à la faiblesse des convictions, à leur formation précipitée ou lente, à la concentration tenace ou à la dispersion changeante de leurs objets. Par manière de désirer, il faut entendre, de même, une prédisposition aux désirs forts ou faibles, impétueux ou lents, tenaces ou changeants, concentrés ou dispersés. Mais, comme ce qui nous importe particulièrement, ou plutôt ce qui importe essentiellement quand il s’agit d’un être essentiellement social, ce sont nos rapports avec nos semblables, notre manière de croire et notre manière de désirer doivent avant tout se caractériser d’après leur mode d’action sur celles d’autrui ou réciproquement. La tendance, l’aptitude de l’individu à imprimer ses croyances et ses désirs sur ceux qui l’entourent ou à recevoir l’empreinte de leurs