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rôle en peinture que l’antithèse dans la poésie de Victor Hugo.

Mais y a-t-il la vraiment quantité et opposition ? Où est ici l’état zéro ? Voilà la difficulté insurmontable. Si notre corps était lumineux par lui-même, de même qu’il a sa température propre, on pourrait regarder la lumière fixe et normale inhérente au corps sain, ou la lumière variable, mais déterminée à chaque instant, inhérente à la rétine, comme l’état zéro optique, nuance de gris si l’on veut, de même qu’on peut regarder la température fixe et normale du corps sain ou la température variable, mais à chaque instant, précise, inhérente à la peau, comme l’état zéro thermique ; et toute élévation lumineuse au-dessus de ce degré s’y opposerait à tout abaissement lumineux au-dessous. Mais, cela n’étant pas, la nuance de gris qu’il nous conviendrait de prendre conventionnellement pour point de départ de l’échelle du blanc et de l’échelle du noir ne saurait être que l’objet d’un choix arbitraire. D’ailleurs, qu’est-ce que le gris ? Un mélange, à doses égales ou inégales, de blanc et de noir. Il n’est donc pas interposé entre eux, il est composé d’eux. En cela il est comparable à tous les mélanges de couleurs. Rien n’empêcherait, par suite, de juger opposées deux couleurs quelconques, en les mêlant l’une avec l’autre à doses régulièrement croissantes ou décroissantes et en considérant l’une des nuances ainsi obtenues, arbitrairement choisie, comme le point de départ d’une double graduation ascendante ou descendante. Complémentaires ou non, n’importe, deux couleurs, le bleu et le rouge, le violet et le vert, le jaune et le pourpre, donneraient lieu à cette illusion de pseudo-quantités formant un pseudo-