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mais la peau s’adapte, jusqu’à un certain degré, à la température extérieure. » Est-ce là, cependant, une opposition rigoureuse ? La condition de similitude entre les deux sensations comparées fait absolument défaut ; dire que la sensation du froid n’est que celle du chaud renversée, cela n’aurait aucun sens intelligible. Ajoutez que l’une et l’autre, à mesure que la température continue à s’élever ou à s’abaisser, se dénaturent très vite et ne restent pas longtemps semblables à elles-mêmes. L’extrême froid et l’extrême chaud produisent une douleur identique ; et, dans les deux cas, c’est une douleur de brûlure. Les deux termes, soi-disant opposés, au lieu d’aller divergeant en accentuant leur opposition, ont fini par se fondre en un seul qui, du reste, n’a rien de commun ni avec l’un, ni avec l’autre, car la sensation de brûlure ne diffère pas moins de celle d’une chaleur douce que de celle d’un froid léger[1].

Parlons enfin du blanc et du noir. Ce fameux contraste visuel, au moins, résistera-t-il à notre analyse ? Dans les théories les plus récentes, on ne regarde plus le blanc,physiologiquement, comme formé par la fusion des autres couleurs. Non, l’action de la lumière blanche sur notre rétine est toute différente de l’effet produit par la lumière colorée. Le blanc n’est pas une couleur comme une autre, c’est certain. C’est sous l’influence des théories évolutionnistes qu’on en est venu à regarder le blanc comme une sensation fondamentale et non composée. On a émis l’hypothèse que la rétine avait commencé (

  1. Remarquons, en passant, que les points de notre peau particulièrement sensibles au froid et au chaud ne sont pas symétriquement répartis sur les deux moitiés droite et gauche de notre corps.