Une gamme qu’on monte et qu’on redescend, une suite de notes parcourues puis reparcourues au rebours, do ré mi fa sol fa mi ré do : voila la phrase musicale élémentaire, la ritournelle initiale, source de l’immense fleuve sonore qui va toujours devant soi sans jamais rétrograder. Il y a loin de ce début à la longue et souple phrase de nos musiciens qui revient au point de départ par des chemins si inattendus. De même, la première phrase sculpturale ou picturale, la période ou la mélodie élémentaire par laquelle les arts du dessin commencent leur évolution, c’est la parfaite symétrie d’un corps représente de face, immobile, debout, ou bien de deux corps vus de profil et se faisant pendant l’un à l’autre comme dans les bas-reliefs assyriens. L’œil barbare qui les admire trouve plaisir à s’y promener plusieurs fois de suite, indéfiniment, sur un chemin de sensations visuelles qui reste exactement le même à l’aller et au retour. Mais, des ses plus humbles progrès, la sculpture tend à dissymétriser ses personnages, et, si elle continue à les répéter en longues files, en files, même de plus en plus prolongées et diversifiées, elle renonce bientôt à les affronter symétriquement, ou du moins, si elle les affronte, elle introduit dans leur vis-à-vis un élément de variété qui ne cesse de se développer aux dépens de la symétrie primitive. Pareillement la musique se plaît aux répétitions nombreuses de ses motifs, longtemps encore après avoir évité l’opposition symétrique de leur période ascendante et de leur période finale. Le regard civilisé, dans un fronton moderne, ne supporte plus qu’une vague similitude entre les poses des personnages à droite et à gauche du groupe central ; et, dans une peinture moderne, il exige une