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chiffrée renfermant des secrets d’État. C’est donc dans le monde infinitésimal que s’accomplit le mystérieux phénomène en ce qu’il a d’essentiel ; mais, comme il n’est pas permis de penser qu’une particule de matière, serait-ce une monade leibnizienne douée de la représentation lucide du monde ambiant, puisse avoir la maîtrise absolue d’un empire compose de myriades de particules sujettes, il convient d’admettre que le résultat visible, l’organisme, est produit par le concours ou le conflit de la force interne de direction systématique et des forces concourantes ou contrariantes du dehors.

Voilà pourquoi les anomalies et les monstruosités apparaissent ; voilà pourquoi, dans l’organisme même normal, tant d’irrégularités et d’asymétries inévitables sont souffertes par le principe coordinateur qui lutte contre elles. Mais on peut penser aussi que, pareilles aux congrégations religieuses ou civiles de l’humanité, la congrégation vivante fait souvent de parti pris, volontairement, les concessions momentanées qui doivent servir à son triomphe futur. Si elle renonce en apparence à la plénitude du développement possessif, c’est pour atteindre, par le sacrifice de la sphéricité, à la beauté, qui semble avoir pour condition la symétrie radiaire ou mieux encore bilatérale, et qui est une plus haute manière de réaliser la totalité. La beauté en effet, dont les divers degrés sont visibles depuis la fronde et la fougère jusqu’aux labiées et aux orchidées, et depuis le corail jusqu’à l’homme, est l’achèvement de l’être ; elle arrête la progressio in inftnitum de l’utilité, elle apparaît comme la colonne d’Hercule de l’évolution en quête de son terme. Mais cette réflexion sur soi de l’être bilatéralement