et si je me hâtais de conclure de là au rejet immédiat de son hypothèse, il ne manquerait pas de me répondre que j’oublie les effets de l’hérédité, de cette force essentiellement vitale par la vertu mystérieuse de laquelle l’argile vivante, jadis modelée par la matière morte dans un autre milieu, garde son vieux modèle et le défend maintenant avec énergie contre un nouveau modelage. Mais je me permettrais de demander à M. Spencer s’il se croit en mesure d’expliquer mécaniquement cette force-là. Je lui demanderais en outre si c’est abuser de l’induction que d’attribuer à cet agent inconnu de la reproduction biologique un goût prononcé pour la symétrie, ou pour toute espèce de reproduction en sens inverse. Ne voit-on pas la symétrie radiaire produite par juxtaposition d’individus semblables ? Les faits montrent que ce n’est point là un rapprochement arbitraire, et qu’en réalité la tendance vitale à s’organiser symétriquement ou régulièrement et la tendance vitale à se multiplier géométriquement, doivent émaner d’un même principe. Elles se suppléent, en effet, se succèdent, et s’éclairent l’une par l’autre. Quand la plante est lasse de faire des utricules, des vaisseaux et des fibres, d’épancher en feuilles multiples, opposées ou alternés, sa sève affaiblie, elle se recueille en fleur, en ovaire, elle concentre ce qui lui reste de force à fabriquer le levain d’une fermentation pareille, qui s’accomplira, celle-là, en dehors d’elle, puisqu’elle ne peut, momentanément du moins, grouper en elle un plus grand nombre d’éléments. L’animal, comme la plante, commence par multiplier sa cellule primitive ; tous ses éléments anatomiques s’éditent infatigablement en innombrables exemplaires, et cette édition reste emmagasinée dans
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