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lohr ; elles correspondent à un niveau scientifique très inférieur ; ainsi la multiplication est ramenée à la duplication et à l’addition ; pour faire le produit d’un nombre par 7, par exemple, on ajoute le nombre à son double et au double de ce dernier. Sous le nom de méthode hellénique, nous ne pouvons comprendre au contraire qu’une méthode analogue à la nôtre, mais appliquée au système de numération alphabétique, et qu’on ne peut, dès lors, considérer comme constituée réellement avant ce système.

En résumé, l’impression que laissent ces divers documents conduit à penser que, si Thalès a introduit en Grèce certains procédés de calcul égyptiens, ces procédés étaient absolument élémentaires, quelques progrès qu’ils pussent constituer pour un peuple encore tout neuf en ces matières. Aucune recherche théorique ne venait d’ailleurs s’ajouter à ces enseignements ; la tradition n’en reconnaît point avant Pythagore, et, à cet égard, elle doit être tenue pour vraie.

5. Pour ce qui concerne la géométrie égyptienne, les renseignements qu’on peut tirer du papyrus de Rhind sont assez sommaires. On peut y noter une ébauche de l’application des proportions au calcul des corps solides, et aussi la racine[1] (pir-e-mus) du mot pyramide ; mais ce qui est le plus remarquable, c’est l’identité entre la forme de rédaction des problèmes et celle qui est suivie dans les ouvrages géodésiques de Héron, d’où elle a passé aux agrimenseurs romains. Toutefois, les procédés d’arpentage sont beaucoup moins perfectionnés que ceux des savants grecs, et ils reviennent parfois à des formules métriques passablement inexactes. Ainsi les Égyptiens mesuraient l’aire d’un quadrilatère en faisant le produit des demi-sommes des côtés opposés.

Cette formule et d’autres aussi fausses, transmises au moyen âge par les héritiers des agrimenseurs romains, se sont perpétuées en Europe, dans les traités élémentaires, jusqu’à l’époque de la Renaissance. Nous aurions donc tort, encore une fois, de les regarder comme acceptées par les véritables représentants du savoir égyptien. Mais on ne peut nier qu’elles soient loin de donner une haute idée des connaissances que possédait la moyenne des arpenteurs sur les rives du Nil ; elles permettent même d’affir-

  1. Le mot égyptien désigne, au reste, non pas le solide, mais son arête.