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Thèbes, à la suite des légions victorieuses d’Assour-Akhé-Idin ou d’Assour-Ban-Habal.

Nous avons donc le droit de supposer connue en Égypte cette période chaldéenne que nous regardons comme le seul moyen pratique pouvant être, à cette époque, employé pour la prédiction des éclipses ; mais admettrons-nous qu’elle fut également connue de Thalès ?

Le fait est très improbable ; il devait y avoir là un secret que les adeptes des doctrines astrologiques ne communiquaient guère aux profanes, et rien n’indique que Thalès ait été initié à ces doctrines. D’un autre côté, la connaissance de la période chaldéenne permet, comme nous l’avons vu, d’annoncer avec assurance les éclipses de lune et non celles de soleil ; les témoignages qui portent un caractère historique devraient donc attribuer à Thalès la prédiction des premières et non pas seulement celle d’une des secondes. Enfin il ne parait nullement avoir transmis le secret de sa méthode.

Reste donc à supposer qu’un astrologue rencontré par Thalès dans ses voyages lui ait, par exemple, prédit un certain nombre d’éclipses avec une précision plus ou moins grande, et que le Milésien, après avoir partiellement vérifié l’exactitude de ces prédictions, se soit hasardé à en prendre une à son compte. Cette hypothèse me semble parfaitement admissible et elle permet d’accorder au récit d’Hérodote un degré de vraisemblance suffisant. D’après ce récit, Thalès aurait simplement fixé l’année de l’éclipse ; s’il y en avait plusieurs de possibles cette année-là, il ne s’était guère aventuré. La grande chance, c’est que l’éclipse ait été totale.

4. Nous clorons ici cette discussion pour aborder désormais l’examen des connaissances mathématiques que Thalès put emprunter aux Égyptiens.

Pour l’arithmétique, nous n’avons qu’un seul témoignage. Iamblique (Sur Nicomaque, 10) lui attribue d’avoir défini le nombre un système d’unités (formule qui est restée classique dans l’antiquité) et l’unité numérique, comme s’appliquant aux objets particuliers. S’il ajoute que ces définitions étaient empruntées aux Égyptiens, il y a peut-être là un indice qu’il reproduit un passage d’Eudème, car cette dernière donnée est conforme à l’opinion d’Aristote sur l’origine des sciences abstraites ; elle est au contraire en désaccord avec la tradition qui fait venir l’arithmétique des Phéniciens.

Cette dernière tradition a sa part, bien faible, de vérité, eu égard