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APPENDICE I. — THÉOPHRASTE, SUR LES SENSATIONS

qu’il eût fallu expliquer, puisqu’il semble constituer le blanc par la lumière ou par quelque autre chose.

81. Il n’est pas plus facile de comprendre comment il explique le noir ; car l’ombre est quelque chose de noir et un obstacle au blanc. Le blanc serait donc d’une nature antérieure. En même temps il ne met pas simplement en jeu l’ombre portée, mais aussi la grossièreté de l’air et de l’effluve entrant dans l’œil, ainsi que le trouble de celui-ci ; mais cela arrive-t-il par suite du défaut de transparence ou par quelque autre chose et dans quelles circonstances, il ne l’explique pas.

82. Il est absurde de ne pas indiquer de forme pour le vert, mais de le constituer seulement de vide et de plein. Car cela est commun à toutes les couleurs et a lieu avec toutes les figures. Il fallait comme pour les autres indiquer quelque particularité, et si le vert est contraire au rouge, comme le noir l’est au blanc, donner la forme opposée ; mais s’il n’est pas contraire, on doit s’étonner qu’il admette des principes non contraires, ce qu’il semble faire en général. Il fallait surtout préciser quelles sont les couleurs simples et pourquoi les unes sont composées, les autres non ; car les plus grandes difficultés sont relatives aux principes. Mais c’est peut-être là une question bien complexe ; si l’on pouvait déterminer les saveurs simples, on pourrait en dire davantage là-dessus. Quant aux odeurs, il a omis de déterminer quelque chose, si ce n’est que, d’après lui, l’odeur est produite par le subtil émanant en effluve des corps lourds. Mais il n’a pas ajouté ce qui peut-être est le plus important, à savoir quelle est la nature de ce qui subit ainsi une action. En somme, Démocrite laisse ainsi de côté diverses questions.

83. Platon définit le chaud ce qui désagrège par l’acuité des angles ; le froid proviendrait des moindres particules qui poussent les plus grandes en cercle, alors que, dégagées par l’humidité, elles ne peuvent pénétrer ; cette lutte occasionnerait un tremblement et ce qu’on appelle le frisson du froid. Le dur est ce à quoi cède la chair, le mou, ce qui cède à la chair ; l’effet réciproque permet d’en juger ; ce qui cède est d’ailleurs ce qui a la moindre base. Le lourd et le léger ne doivent pas être déterminés par le haut ou le bas, car il n’y a pas de nature de ce genre ; mais le léger est ce qui est facilement tiré hors de son lieu naturel, le lourd ce qui ne l’est que difficilement. Pour l’âpre et le lisse, il les laisse de côté comme n’offrant aucune obscurité et il n’en parle point.