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POUR L’HISTOIRE DE LA SCIENCE HELLÈNE.

s’échauffe ; car c’est ce qui a le plus de vide qui s’échauffe le mieux. — Le doux est au contraire composé de figures arrondies qui ne sont pas trop petites, en sorte qu’elles se répandent facilement dans tout le corps, sans violence, mais en circulant lentement ; il produit des troubles parce qu’il s’insinue dans des parties qu’il délaie et dérange de leur place ; tout ce liquide ainsi mis en mouvement va couler dans les intestins, là où il trouve le plus de vide et le passage le plus facile.

66. L’astringent est composé de grandes figures très anguleuses et aussi peu arrondies que possible ; quand celles-ci pénètrent dans le corps, elles obstruent les petites veines, les aveuglent, les empêchent de couler, ce qui arrête le cours de ventre. L’amer est constitué de petits globules lisses, dont toutefois le contour présente des inflexions, ce qui le rend visqueux et collant. Le salé est formé de grandes figures qui ne sont pas arrondies, dont quelques-unes même sont scalènes, et qui n’ont pas non plus beaucoup d’inflexions (par scalènes, il entend des figures qui s’accrochent et s’entrelacent réciproquement) ; elles sont grandes, puisque le liquide salé reste à la surface ; si elles étaient petites, sous le choc des particules ambiantes, elles pénétreraient dans tout le corps ; elles ne sont pas arrondies, parce que le sel a des aspérités, que l’arrondi est lisse ; elles ne sont pas toutes scalènes, sans quoi le sel pourrait se pétrir, tandis qu’il est friable.

67. Le brûlant est petit, arrondi, avec des angles et sans scalène ; les aspérités dues aux angles font qu’il échauffe et perce au travers du corps ; car c’est là le propre de l’anguleux. Le gras est petit, arrondi et sans angles. — Il ramène de même les autres propriétés particulières aux figures. Mais, dit-il, de toutes les figures, il n’y en a point qui se trouve pure, sans mélange avec d’autres ; chaque substance, au contraire, en contient de toutes sortes, et a en même temps du lisse, du raboteux, du rond, du piquant, etc. Ce qui domine produit l’effet décisif pour la sensation et la propriété. Il y a d’ailleurs de grandes différences suivant la disposition du corps où pénètrent les substances. Aussi la même peut produire parfois des effets contraires, et des substances contraires peuvent produire le même effet.

68. Voilà ses déterminations sur les saveurs. En premier lien, il ne parait pas raisonnable de ne point rendre raison de tout d’une même façon, mais d’expliquer le lourd, le léger, le mon et le dur par la grandeur, la petitesse, le degré de resserrement ou