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vent le contempler en face (cf. v. 242), Empédocle revenait de fait accidentellement à une opinion du vieil Anaximandre, en ce sens qu’il rejetait le soleil aux confins du monde (10). C’est d’ailleurs probablement grâce à lui que cette idée d’identifier le rayon de l’orbite solaire avec celui de la sphère céleste s’est perpétuée en Sicile et qu’Archimède, dans son Arénaire, la présentait encore comme courante.

Celle de supposer le disque du soleil égal à la terre (comme l’image est égale à l’objet dans les miroirs plans) est propre à Empédocle, mais la place qu’il assigne à la lune (deux fois plus loin du soleil que de la terre) paraît correspondre à une combinaison numérique où il aura peut-être voulu imiter Anaximandre, pour préciser à l’imagination la répartition dans le cosmos des grandes masses distinctes, comme il avait prétendu aussi préciser, par exemple, la composition des os. Il est clair, en effet, que pour lui, d’après la nature qu’il attribue à la lune, celle-ci se trouve à très peu près à la limite supérieure de l’atmosphère terrestre.

Anaximandre avait placé les étoiles au tiers, la lune aux deux tiers de la distance de la lune au soleil ; Empédocle devait naturellement intervertir la position assignée à la lune en la plaçant au tiers de la distance ( d ), le reste de l’intervalle n’étant réservé que pour les planètes. Si les mathématiciens de l’école de Pythagore avaient déjà spéculé, eux aussi, sur les intervalles de ces dernières, Empédocle aurait eu beau jeu pour les imiter; mais il ne semble aucunement l’avoir fait.

9. L’aperçu qui précède suffit, en somme, pour prouver que la cosmologie d’Empédocle ne présente pas une véritable originalité et que sa doctrine neuve sur les éléments ne lui a nullement donné l’occasion d’apporter quelque modification sérieuse et valable aux conceptions antérieures. On en peut dire autant de ses opinions sur les phénomènes de la nature inorganique; mais ce ne sont pas les sujets qui le captivent davantage. 11 s’attache surtout

(1) En supposant la terre sphérique, en admettant qu’Empédocle prit, comme Thalès, le diamètre du soleil pour la sept cent vingtième partie orbite, enfin en prenant approximativement, connue les anciens Grecs, 3 pour le rapport de la circonférence au diamètre, il s’ensuivrait, d’après les indications mentionnées, que le rayon de l’orbite solaire serait d’environ 240 rayons terrestres et le rayon de Torbite lunaire de 80 rayons terrestre-. Si ce dernier chiffre n’est guère supérieur que d’un quart à la réalité, il n’y a évidemment la qu’un simple hasard,