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CHAPITRE XIII. — EMPÉDOCLE D'AGrIGENTÊ. 317

soulevée, sans avoir recours à la providence du Noos, qui aurait de la sorte rendu la terre habitable. Il est trop clair qu'Empédocle n'a nullement modifié l'hypothèse d'Anaxagore, qu'il a simple- ment prétendu donner une explication mécanique de l'inclinaison supposée.

On nous dit d'autre part (15) qu'Empédocle n'admettait même pas pour sa voûte éthérienne une forme rigoureusement sphérique, qu'il la comparait à un œuf. La raison que met en avant Éd. Zeller pour repousser cette indication est sans valeur; Empédocle pouvait, sans la moindre difficulté relative au mouvement du ciel, l'imaginer comme un sphéroïde soit aplati, soit allongé aux pôles. La compa- raison avec l'œuf, le terme technique de TrXaTOç (latitude) employé dans le texte, d'ailleurs assez obscur, du doxographe pour désigner la dimension la plus étendue, enfin la convenance, dans les idées d'Empédocle, de ménager un espace vide à l'équateur plutôt qu'aux pôles pour y loger le Neikos rejeté hors du cosmos, paraissent indiquer qu'il avait plutôt choisi la seconde alternative.

Quoi qu'il en soit à cet égard, le nom du Sphéros peut être aussi invoqué comme motif de penser qu'Empédocle croyait devoir attribuer au cosmos une forme différente, peut-être sous l'in- fluence des traditions orphiques, qu'indique la comparaison avec l'œuf. D'autre part, il attribuait toujours à la lune, de même qu'Anaxagore, la forme d'un disque. Il y a donc des raisons sérieuses pour douter au moins de son opinion relativement à la terre. Peut-être, au reste, ne l'avait-il pas énoncée dans ses vers.

Pour les étoiles, feux isolés au milieu de l'éther, dont il attache les uns à la voûte de « crystal » (fixes), dont il fait flotter les autres au-dessous (planètes), il s'en tient à la conception d'Anaximène. Pour la lune, au contraire, comme je l'ai dit, Empédocle adopte la doctrine d'Anaxagore; c'est un corps obscur par lui-même, qui reçoit sa lumière du soleil, qui est d'ailleurs opaque et peut dès lors éclipser l'astre du jour. Toutefois, l'Agrigentin ne reconnaît point ce corps comme de nature terreuse; c'est une concrétion formée par de l'air nuageux.

Quant au soleil, j'ai déjà indiqué (page 236) la conception toute particulière que s'en faisait Empédocle et j'ai montré comment elle se reliait à celle de Parménide.

Tout en ne voyant dans cet astre qu'une image lumineuse de la terre éclairée par le feu du jour et reflétée sur la voûte céleste de crystal, qu'un phénomène qui n'existe que pour les yeux qui peu-

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