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des problèmes soulevés dans l’âge des sophistes, aboutit naturellement à la constitution de la théorie des Idées platoniciennes.

L’évolution était d’autant plus naturelle qu’Anaxagore avait moins limité le nombre des espèces qu’il concevait comme correspondant aux phénomènes : étendre son explication à tous les domaines de la pensée, au lieu de la restreindre aux faits de la sensation, voilà ce que fit Platon.

Je ne crois donc pas m’ètre trop avancé en disant que la théorie d’Anaxagore sur la matière est un facteur essentiel des conceptions platoniciennes, et qu’il est indispensable d’en tenir compte pour envisager ces conceptions sous toutes leurs faces.

11. Les indications que j’ai essayé de donner suffiront, je l’espère, à mes lecteurs, et je crois inutile d’insister. Toutefois, je ne dois pas dissimuler, et ceci prouve précisément l’originalité de Platon, que, tandis qu’il extrayait de la doctrine d’Anaxagore ce que celle-ci pouvait lui donner, il entrait dans de tout autres voies pour élaborer sa propre conception de la matière.

La science du Clazoménien fut bien vite surannée; Platon, d’ailleurs, subit incontestablement l’influence des pythagoriens, mais moins sous le rapport de la doctrine générale que des théories particulières; dans son Timée, il a essayé un très curieux compromis entre la négation du vide et l’hypothèse des atomes.

Il considère comme des composés les éléments matériels, amenés au nombre fixé par Empédocle; par un reste assez singulier du dualisme pythagorien primitif, il admet que trois de ces éléments peuvent se convertir les uns dans les autres; la terre, au contraire, l’élément solide par excellence, n’est pas susceptible de transformation ; dès lors, pour composer les quatre éléments, il prend dcu.i- sortes de triangles, qui sont en réalité de véritables atomes.

Seulement, au lieu de concevoir ces atomes, ainsi que Leucippe, sous forme de petites masses globuleuses isolées, Platon 1rs représente comme ayant une dimension négligeable par rapport aux deux autres, assimilables par suite à des plans de formes géométriques et de différentes grandeurs, en sorte qu’on puisse se figurer qu’ils remplissent tout l’espace. Son disciple Xénocrate transforma cette conception en substituant aux surfaces atomes de son maître, • les lignes atomes; mais il est bien clair, en tout cas, que l’insécabilité de ces lignes ou de ces Surfaces doit être conçue au point de