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s’il y a un élément final, il sera rigoureusement nul (application du principe des limites), ce qui se confirme d’ailleurs par cette raison que la division ultérieure n’est plus possible, parce qu’alors l’élément ne présente plus de parties différentes l’une de l’autre, qu’il est rigoureusement réduit à un seul et même point; or, l’addition de ces éléments nuls, si nombreux qu’ils soient, ne peut jamais donner qu’une somme nulle. Par conséquent, la chose divisée ne peut avoir aucune grandeur.

Mais (seconde partie du dilemme) l’adversaire peut soutenir que la division ne donnera jamais que des parties ayant une grandeur et que, par conséquent, l’élément final en aura lui-même une; dans ce cas, comme la division se prolonge à l’infini, il y a un nombre infini de ces éléments; donc la chose divisée aura une grandeur infinie.

En somme, Zenon démontre rigoureusement que le continu (c’est-à-dire le divisible à l’infini) ne peut être conçu comme une somme d’éléments indivisibles, suivant le préjugé vulgaire adopté par les pythagoriens ; car, si ces éléments n’ont aucune grandeur, leur somme ne peut en avoir; s’ils ont au contraire une grandeur, comme leur nombre est infini, leur somme serait infinie.

7. Simplicius dit encore (avant le dernier passage qui précède, 30 b) que Zenon démontrait que, s’il y a pluralité, les mêmes choses sont limitées et illimitées. « S’il y a pluralité, il est nécessaire qu’elles soient autant qu’elles sont, ni plus, ni moins. Étant autant qu’elles sont, elles seront limitées; mais s’il y a pluralité, elles sont illimitées; car il y en a toujours d’autres entre les unités, et encore d’autres entre les précédentes, et ainsi les choses seront illimitées. »

C’est ce passage que Simplicius dit donner textuellement; il est clair que sa brièveté est très suspecte ; mais le sens général n’est pas douteux. Ici Zenon amène réellement son adversaire à une contradiction : dire que les corps sont une somme de points, c’est admettre implicitement que le nombre de points y est limité, mais il est certain au contraire qu’entre deux points, si voisins qu’ils soient, du moment où ils ne se confondent pas rigoureusement, il y a d’autres points, puisque la division à l’infini est toujours possible. Tel est bien certainement le sens de l’argumentation que Zeller a mal rendu, quoiqu’il ait reconnu le λογος de la dichotomie, comme disaient les anciens. Ce terme vient évidemment de