Page:Tannery - Pour l’histoire de la science Hellène.djvu/265

Cette page n’a pas encore été corrigée

» étant ajouté, ne fait pas augmentation et, étant retranché, ne fait pas diminution, il le considérait comme ne faisant pas partie de ce qui est Si Zenon était devant nous, nous répondrions qu’en acte ce qui est un n’est pas pluralité; l’unité lui appartient proprement, la pluralité n’est qu’en puissance. »

L’élève du Stagirite tient naturellement à appliquer la formule de son maître ; il introduit d’ailleurs la pluralité des attributs, dont Aristote se préoccupe au passage commenté, mais qui n’a rien à faire avec l’argument de Zenon; la forme sceptique attribuée à la doctrine de l’Éléate peut d’ailleurs tenir au mode d’exposition dialogué de cet argument, mais ce dernier est très clair, et Alexandre d’Aphrodisias (Simplic, 21 b) le reproduit très bien. La pluralité est une collection d’unités, il faut donc savoir ce que serait l’unité dans les êtres; d’après l’adversaire, c’est le point; mais le point n’est rien; donc il n’y a pas pluralité. Simplicius (ibid.) se trompe en croyant que d’après Eudème, Zenon nie aussi l’unité; il nie seulement que l’unité soit le point, qui n’est rien; l’unité pour lui, comme pour Parménide, c’est l’ensemble des choses; les divisions qu’on y introduit ne lui enlèvent pas sa continuité réelle ni son caractère d’unité ; il ne faut pas transférer ce caractère à un prétendu élément indivisible des corps.

6. Plus loin, à la vérité (30 a), Simplicius revient sur ce qu’il a dit et attribue même à Alexandre d’Aphrodisias l’erreur où il est tombé ; puis il développe l’argumentation de Zenon :

« Dans son écrit, qui renferme plusieurs épichérèmes, il montre par chacun d’eux que celui qui affirme la pluralité arrive à affirmer des contradictoires; dans un de ces épichérèmes, il montre, par exemple, que si les choses sont pluralité, elles sont en même temps grandes et petites, et tellement grandes que leur grandeur est infinie, tellement petites qu’elles n’ont pas de grandeur. Pour ceci, il montre que ce qui n’a ni grandeur, ni épaisseur, ni volume, n’est rien. « Si en effet, dit-il, on l’ajoute à autre chose, il ne la rend pas plus grande; car ajoutez une grandeur nulle, vous ne pouvez augmenter la grandeur; ainsi l’augmentation sera nulle. » Retranchez au contraire, l’autre chose ne sera en rien moindre, comme elle n’était en rien plus grande par l’addition; ainsi l’augmentation et la diminution sont nulles. » Zenon parle ainsi sans nier l’unité, mais il nie la grandeur de l’un quelconque des éléments de la pluralité infinie, parce qu’au-dessous de telle gran-