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POUR L’HISTOIRE DE LA SCIENCE HELLÈNE.


11. Au lieu de suivre l’ordre par écoles, suivant la tradition de l’histoire philosophique, j’ai cherché à suivre l’ordre des temps, le seul qui puisse faire apprécier la succession des progrès scientifiques et la transmission des découvertes. Même au point de vue philosophique, cet ordre ne présente d’ailleurs aucun inconvénient pour une époque où l’enseignement d’école n’a guère existé, de fait, en dehors des pythagoriens, d’autant que l’évolution qu’ont pu subir les doctrines de ces derniers nous est, pour ainsi dire, absolument inconnue.

Mais la chronologie des philosophes de l’âge hellène présente des difficultés considérables et souvent de graves incertitudes. J’ai donc été amené à la discuter dans un chapitre particulier, dont je puis dès maintenant énoncer la conclusion générale ; c’est que, sur cette question, les anciens n’avaient guère de documents sérieux que nous ne connaissions d’ailleurs ; que la tradition la mieux assurée est, en réalité, passablement incertaine ; que dès lors, là où elle prête à l’indécision, on doit se former une opinion d’après les indices fournis par la comparaison des doctrines.

12. Un autre chapitre, dont l’objet est également général, précède aussi les monographies particulières et suit l’introduction. S’il y a, en effet, une question préalable à résoudre, c’est celle qui concerne la valeur des sources utilisées pour ces monographies, alors que les ouvrages des physiologues sont perdus sans exception.

Ces sources sont d’une double nature : en premier lieu, nous possédons des fragments, tantôt très minimes, tantôt, au contraire, vraiment considérables. Ils nous ont été conservés d’ordinaire, soit par des polygraphes, soit par des commentateurs, appartenant, les uns et les autres, soit à la période gréco-romaine, soit à l’âge de décadence. En dehors des questions que peut soulever l’authenticité de ces fragments, il convient de remarquer qu’en thèse générale, ils ne peuvent guère être isolés du texte de l’écrivain qui les a conservés et qui, d’ordinaire, détermine d’une certaine façon leur signification souvent obscure. Dès lors, on est appelé à se demander si l’ouvrage cité existait encore réellement au moment de la citation, s’il a été lu en entier par l’auteur qui cite, en sorte que ce dernier se soit bien pénétré des doctrines antiques, ou si, au contraire, il ne transcrit que de seconde main, soit sur des Excerpta insuffisants, suit sur quelque autre écrivain, lui-même plus ou moins sujet à caution.