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torturent de toute façon les malades et, leur faisant un bien qui est la même chose qu’une maladie, réclament une récompense qu’ils ne méritent guère. — 91. Le chemin droit et le contourné est un et le même ; le chemin en haut ou en bas est un et le même. (Voir la note qui suit les fragments.)

92. Ce n’est pas à moi, mais au logos qu’il est sage d’accorder que l’un devient toutes choses. — 93. Ils ne comprennent pas comment ce qui lutte avec soi-même peut s’accorder.

94. Ce qu’on voit, ce qu’on entend, ce qu’on apprend, voilà ce que j’estime davantage.

95. Les hommes se trompent pour la connaissance des choses évidentes comme Homère qui fut le plus sage des Grecs. Des enfants, qui faisaient la chasse à leur vermine, l’ont trompé en disant : « Ce que nous voyons et prenons, nous le laissons ; ce que nous ne voyons ni ne prenons, nous l’emportons. »

96. Les hommes ne savent pas juger des choses obscures d’après les évidentes ; ils ignorent que la nature humaine ressemble aux arts dont ils font usage. Car l’intelligence des dieux a enseigné à imiter leurs œuvres ; mais, si les hommes savent ce qu’ils font, ils ignorent ce qu’ils imitent. Toutes choses dissemblables sont semblables ; toutes choses différentes sont concordantes, toutes non-parlantes, parlantes, toutes sans raison, douées de raison ; seulement le mode reconnu pour chacune est contraire. Car la loi et la nature, par quoi tout se fait, ne s’accordent pas sur les choses reconnues ; la loi a été établie par les hommes pour eux-mêmes, sans qu’ils sussent sur quoi ils l’établissaient ; la nature a été disposée par les dieux. Or, ce qui a été établi par les hommes n’est jamais constant ni sur ce qui est droit ni sur ce qui ne l’est pas ; ce que les dieux ont établi est toujours droit ; voilà en quoi diffère ce qui est droit et ce qui ne l’est pas.



Note sur le Fragment 91.


Une des sources les plus fécondes en fragments d’Heraclite se rencontre au livre IX de la Réfutation de toutes les hérésies attribuée à saint Hippolyte[1]. Parmi ces fragments, il en est un

  1. Je ne donne pas ici à cet ouvrage le nom de Philosophumena, parce que ce nom me semble devoir être réservé pour la première partie.