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de foi, attribue à Pythagore les mêmes connaissances astronomiques ; si d’ailleurs Anaximène semble s’être prudemment gardé de spéculer, à l’exemple d’Anaximandre et comme devait le faire l’école pythagorienne, sur les distances des astres, il paraît, comme nous le verrons, avoir adopté le même ordre que cette école en plaçant à partir de la terre, d’abord la lune, puis le soleil, enfin les cinq planètes. Anaximène aurait-il donc reçu les enseignements de Pythagore ?

Cet indice, absolument isolé, est sans valeur. D’une part, les progrès pratiques de l’astronomie hellène semblent s’être effectués sur les côtes de l’Asie-Mineure, tout à fait en dehors de l’école de Pythagore. C’est précisément vers la seconde moitié du ve siècle que se placent les premiers qui, suivant la voie ouverte par Thalès, font profession d’observer les astres, distinguent régulièrement les constellations, s’occupent du calendrier et de la prédiction du temps. Ce sont principalement des Éoliens, Cléostrate de Ténédos, Matricétas de Méthymne ; mais Anaximène doit les connaître, car il combat (9) le préjugé que les changements de temps soient dus aux levers et couchers des fixes, et il attribue ces changements à la seule influence du soleil. D’un autre côté, depuis la conquête perse, les conceptions cosmologiques de la Chaldée pouvaient se propager plus facilement en Ionie, et il est précisément remarquable que l’ordre de situation des planètes d’Anaximène et des pythagoriens soit aussi celui qu’a adopté Héraclite.

Que cet ordre ait été celui des Chaldéens, il n’y a pas de doute ; mais qu’il ait été professé par Pythagore lui-même, on peut le mettre sérieusement en question. Quelles qu’aient été ses connaissances astronomiques, le mystique Samien qui appelait les planètes les « chiennes de Perséphone » (Aristote dans Porphyre, Vit. Pyth., 41), a bien pu ne pas se prononcer sur leur situation et, comme l’on peut parfaitement constater l’adoption après lui par son école de données scientifiques bien postérieures (par exemple, le cycle d’Œnopide dans Philolaos et la théorie des éclipses), il est parfaitement permis de mettre en doute que celle dont il s’agit remonte au Maître lui-même ou du moins lui appartienne en propre.

Pour les communications que l’École a pu avoir, soit après lui, soit de son vivant même, avec la Chaldée, que l’on songe, par exemple, à ce médecin Démocède, qui s’échappa de la cour de Darius, épousa la fille de Milon de Crotone et joua un rôle actif dans les guerres civiles où sombra l’institut pythagorique (Héro-