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POUR L’HISTOIRE DE LA SCIENCE HELLÈNE.

s’en occuperont, mais seulement pour satisfaire aux nécessités de l’enseignement, pour ne pas rester, à cet égard, en arrière des autres écoles. C’est à eux surtout qu’Aristote suffit, quand ils ne remontent pas jusqu’à Héraclite : au moins l’école d’Épicure nous a-t-elle légué l’admirable poème de Lucrèce ; du Portique, il ne nous est parvenu, pour la science, que des fragments sans importance et, sans doute, le reste méritait assez l’oubli qui l’a recouvert.

3. À la suite des armées d’Alexandre, l’hellénisme a conquis l’Orient ; il y multiplie les centres de culture intellectuelle ; Alexandrie, Rhodes, Pergame font pâlir l’éclat de l’antique cité de Minerve ; mais cette brillante civilisation ne peut s’asseoir sur des institutions politiques communes et conformes à son génie. Peu à peu, elle perd son indépendance et doit se plier à la suprématie romaine ; lorsque l’Égypte des Ptolémées succombe à son tour, lorsque Auguste fonde l’empire, une troisième période s’ouvre qu’on peut appeler gréco-romaine.

À son tour, elle embrasse, elle aussi, trois siècles en nombre rond, jusqu’à la révolution politique et religieuse accomplie par Constantin ; alors l’Orient hellénisé retrouve, de fait, son indépendance, mais en gardant l’unité d’un régime politique traditionnel. Le nouvel empire, ainsi constitué, reprend une vitalité qui désormais fait défaut à l’Occident latin ; malgré les assauts des Barbares, il défendra son intégrité jusqu’à l’invasion arabe, pendant trois siècles encore, et, quoique ensuite amoindri de plus en plus, il prolongera son existence sénile jusqu’à l’aurore des temps modernes.

Mais il faut au plus tard clore l’histoire de la science antique au moment où l’islamisme s’empare de la cité qui, depuis sa fondation par Alexandre, avait toujours été le plus actif foyer de cette science. Et cependant il avait déjà cessé d’éclairer le monde, tourné vers un autre pôle, avide d’une autre lumière. Encore assez vivace au ive siècle, l’hellénisme avait fourni pour son existence, contre la nouvelle religion, contre les institutions et les mœurs transformées, une lutte aussi longue qu’honorable ; vers le milieu du vie siècle, ses derniers représentants s’éteignaient et ne léguaient à leurs disciples, désormais tous chrétiens, que des enseignements inféconds. Fille de l’hellénisme, la science antique en partagea le sort ; la nouvelle société ne voulait qu’une science chrétienne, et elle s’enferma dans la théologie.