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et caché soubs l’appast ; De mesme le Sieur de Remereuille ayant faict tous ses efforts contre la Doctrine de ce bon religieux, il a enfin servi de prinse à l’hameçon de la vérité qu’il luy proposoit de maniere que le Pere Victor s’estant rendu à Gontaut apres une conférence privée, ce bon Religieux surnommé Victor, a sur luy obtenu les effects de son surnom, et a demeure le vainqueur, de mesme que quelque temps auparavant de cet autre Ministre, qui apres avoir presché l’Heresie l’espace de vingt-deux ans, feut par luy converty à Saincte-Frique.[1] Mais heureuse victoire pour le Sieur de Remereville, parcequ’estant faict par icelle participant des sacrées espérances de la gloire eternelle, il a esté garenty de son infaillible perdition, qui pour toute certitude l’alloit precipitant dans les enfers : Aussi en recognoissance de ce, apres que la dureté de son cœur opiniastre luy feut r’amoilie par les doux enseignemens de ce bon Religieux, et ses yeux dessillés et esclairés par les rayons de la vérité, il esmeut soudain ce mesme cœur par des sanglots tres-frequents d’un repentir amer, pour pousser au dehors le venin que l’Heresie y avoit infus, et baigna ses yeux d’une abondance de larmes, pour en purger la berleiie, qui lui avoit faict mescognoistre la verité, et auec protestation de ne croire et suyure desormais que ce que ce bon Religieux luy enseignoit, promit de se rendre dans la ville de Bourdeaux pour abjurer publiquement son Heresie, et faire profession de la Religion Catholique Apostolique et Romaine, satisfaisant laquelle promesse le Dimanche quatriesme du present mois de Fevrier dans le Conuent des Peres Capucins de la present ville, en presence de Monseigneur le Duc Despernon,[2]de plusieurs de Messieurs les Presidents et Conseillers de la Cour de Parlement, de Messieurs les Jurats, et du reste de l’Assemblée aussi grande que le pourpris de l’Eglise le peut permettre, Vespres ayant esté prealablement dictes

  1. Saint-Afrique, chef-lieu d’arrondissement du département de l’Aveyron.
  2. Jean-Louis de Nogaret, duc d’Épernon, était, comme je l’ai rappelé dans l’Avertissement, gouverneur de la province de Guyenne depuis l’année 1622. On lit dans la Chronique Bourdeloise. Continuation (Bordeaux, 1703, in-4o, p. 29, sous l’année 1629.) « Un ministre de Duras ayant abjuré sa religion dans l’église des Capucins de cette ville, Monsieur Despernon gouverneur, et Messieurs les Jurats assistèrent à cette ceremonie, où il se trouva une grande affluënce de personnes : il declara avoir esté illuminé du Saint-Esprit