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de Saignon[1], se rendit un des plus habilles hommes de son temps aux lettres latines, grecques et hébraïques, mais son savoir qui devait le garantir des surprises de l’heresie ne servit qu’à le précipiter dans l’erreur. Quand la science n’est pas accompagnée d’un esprit de soumission, elle est ordinairement plus funeste qu’elle n’est utile. Il eust neantmoins l’avantage de ne persister pas longtemps dans son aveuglement et de rentrer avant sa mort dans le giron de l’Église, après un esgarement de quelques années, et finit enfin ses jours avec l’estime generalle de tous les scavans de la Province de Guyenne où par arrest de la Cour des Aides de l’an 1632 il fut déclaré exempt de tailles attendu sa qualité. »

Le petit-neveu de Pompée de Remerville dit encore (Additions, fo 882) que notre homme abjura "dans l’Église des Capucins de Bourdeaux, en présence de la reine Anne d’Autriche qui le fit coucher sur l’Estat pour mille livres de pension du Gouverneur de la Province et du duc d’Épernon. » Comme le Gouverneur de la Guyenne et Jean Louis de Nogaret n’étaient (depuis 1622) qu’un seul et même personnage, on ne peut voir qu’un lapsus dans la phrase où le narrateur n’admet pas leur identité.[2] Mais, après avoir si étrangement dédoublé le duc-gouverneur, il attribue par une inadvertance non moins singulière le don d’ubiquité à la reine Anne d’Autriche, et il la fait assister à la cérémonie de Bordeaux pendant qu’elle était à Paris. Ce qu’il y a de plaisant, c’est qu’il invoque sur ce point, à la marge de son manuscrit, le témoignage même de l’Abjuration imprimée de Pompée de Remerville, témoignage qui le condamne formellement. Du reste, comme si la fatalité s’en mêlait, une erreur plus formidable encore a été commise par le docteur Barjavel, lequel, en son Dictionnaire de Vaucluse (tome II, p. 314), s’exprime ainsi : « Il fit son abjuration à Bordeaux en présence d’Anne d’Autriche qui lui accorda une pension de mille livres et le nomma Gouverneur de Guyenne (!) et du duc d’Épernon (!).[3] »

  1. Aujourd’hui chef lieu de la commune de ce nom, situé à 4 kilomètres de la ville d’Apt. Les ruines de l’ancien château se voient encore sur le sommet de la colline qui domine le village.
  2. L’Hérodote aptésien, comme on a surnommé le sieur de Saint-Quentin, a probablement voulu écrire « du gouverneur de la province, le duc d’Épernon.
  3. On retrouve ces énormités dans un autre ouvrage du docteur Barjavel