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honestes gens et elle a travaillé dans tous les temps avec une application singulière et une tendresse qui ne s’est jamais démentie à nous inspirer des sentiments de religion, d’honneur et de probité.

Lorsque je fus capable de quelque chose de plus, mon père, ne pouvant pas me donner tout le temps qu’il auroit voulu parceque les occupations du palais luy en enlevoit (sic) pour lors beaucoup, il fut forcé de me donner un précepteur qu’il renvoia bientost après mal satisfait du peu d’attention qu’il avoit à m’instruire ; il ne fut pas plus content de celuy qui prit sa place, car comme il veilloit autant que ses affaires pouvoient le luy permettre, sur tout ce qui me regardoit, qu’il me faisoit par temps reciter mes leçons et qu’il jettoit quelquesfois les yeux sur mes thèmes, il s’apperceut que ce second précepteur me negligoit (sic) et il le congédia. Le troisiesme ne fit guieres mieux il ne fut pourtant pas renvoié parce qu’étant tombé malade à Marmande pandant les vaccations et les cours estant sorties de Bordeaux (où la famille ne retourna plus depuis) à la Saint-Martin il demanda se retirer et je n’eus plus au logis de précepteur. J’avoue qu’un bon précepteur est d’un grand secours à un jeune homme lorsqu’il a l’esprit juste, les mœurs bonnes, de la capacité et de l’érudition, il donne à son disciple des principes de vertu, de piété, de politesse et de littérature qui ne s’effacent jamais tout à fait, mais il est si rare d’en trouver de tels, que je croy qu’il est plus avantageux et pour l’escolier et pour la famille de s’en passer que de courre le risque d’en prendre quelqu’un qui soit d’un mauvais caractère.

En novembre 1675 le roy sortit les cours supérieures de Bordeaux et la Cour des Aydes fut transférée à Libourne. Nous estions pour lors à Marmande où nous venions régulièrement passer le temps des vacations et d’où la famille n’est pas depuis sortie. Le précepteur que j’avois dans ce temps se retira peu après, et mon père m’envoia en classe premièrement chès Mr  Dupreau et ensuite chès Mr  Lamolère, régent de lad[ite] ville de Marmande ; j’estudiai sous ce dernier jusques à ce que mon père me mena luy mesme à Condom pour y faire la retorique chès les pères de l’Oratoire où il me mit en pension en 1679[1].

  1. C’était alors un des plus florissants de tous les établissements d’instruction publique du Sud-Ouest. Voir dans la Revue de Gascogne de 1887 la remarquable étude consacrée par M. Joseph Gardère au Collège de Condom sous les oratoriens