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adressé à l’abbé de Saint-Véran, qui fut le premier conservateur de la magnifique bibliothèque donnée par son oncle, Mgr d’Inguimbert, à la ville de Carpentras.


I

À Monsieur, Monsieur Thomassin, sieur de Mazaugue, conseiller en la chambre des comptes d’Aix


À Paris, ce 12 septembre[1]
Monsieur mon Cousin,

La grace de nostre Seigneur à jamais. C’est par là que nous commençons toutes nos lettres, et dans cette rencontre, il est difficile de commencer autrement. Car dans une si extreme affliction, et dans une si estrange perte, quelle consolation hors de la grace de Dieu, qui nous a faict jouyr si long temps d’un si grand bien, et qui ne nous en a privez, que pour nous apprendre à ne rien aimer dans le monde que par rapport au ciel et dans les veües de l’éternité ! Il est de vostre bonté, Monsieur mon cousin, de continuer aux enfans du defunct[2] la mesme charité et la mesme amitié, que nous avions pour luy, et à apprendre par vostre exemple à messieurs vos enfans à regarder tous leurs cousins et tous ceux de la famille, comme leurs freres. C’est ceste amitié chrestienne qui faict la meilleure partie du bonheur de la vie presente, et qui nous fait le plus meriter la felicité de l’autre vie. Messieurs vos enfans ne m’ont aucune obligation de l’amitié et de l’estime que j’ay pour eux. C’est un pur effect de la justice que je leur dois, et de mon inclination pour des personnes aussi aymables et aussi accomplies qu’ils sont. Le cousin Henry porte sur le visage une partie de la douceur et de la beauté de son esprit[3]. Monsieur de Nazaugues a toutes les inclina-

  1. Le millésime manque, comme à toutes les autres lettres, moins une, du P. Thomassin Je place celle-ci en tête du petit recueil, d’abord parce qu’elle est adressée au père du futur conseiller au parlement de Provence ; ensuite parce que, comme nous l’apprend la date du décès dont il y est question (voir la note suivante), elle est de 1670, par conséquent antérieure aux lettres II et III.
  2. Ce défunt, qui est appelé plus loin le président de Lagarde était François de Thomassin, seigneur de Lagarde, conseiller, puis président aux enquêtes du parlement de Provence. Il fut enseveli en l’église de l’Oratoire d’Aix, le 26 août 1670. Il était fils de Joseph de Thomassin, dont le frère, Alexandre, était père d’Alphonse, seigneur de Mazaugues Par conséquent, le président de Lagarde était le cousin germain de celui à qui la présente lettre est adressée.
  3. Le cousin Henri était un frère de Louis de Thomassin, seigneur de Mazaugues. Les généalogistes ne le connaissent pas et ils ne mentionnent, parmi les enfants du conseiller à la cour des comptes, que : 1o Louis ; 2o Jean-Baptiste, officier aux gardes françaises, qui fut consul d’Aix en 1701 ; 3o Louise (alias Françoise), qui épousa Louis Esmur de Moissac ; 4o Honorée, qui épousa Antoine Maurel de Volonne.