Page:Tamizey de Larroque - Le chroniqueur Proché, documents inédits.djvu/24

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 19 —

à aucun effet qui put diminuer mon extrême attachement pour vous. Je l’attribuais à quelque dérangement ou à des grandes occupations. Je vois avec peine que vous avez été malade. Vous devez imputer cette incommodité aux fatigues des vendanges[1] et vous ménager plus que vous ne faites[2]. La santé est un des plus grands biens de ce monde ; sans elle on ne jouit d’aucun plaisir. Mettez donc moins d’ardeur dans votre travail, et tâchez de vous conserver pour vous et pour vos amis[3].

J’ai différé moi-même de vous répondre dans l’espoir que je verrois quelqu’un du pays, mais personne n’a paru. Il y a plus, j’ai écrit plusieurs lettres à Gontaud ou aux environs, il y a plus d’un mois, je n’ai reçu aucune nouvelle ; je ne sais qu’en penser. Je vous prie de vouloir m’expliquer cela, et de me dire pourquoi Madame Ricaud n’envoie pas son

  1. Mon grand-père soignait avec une véritable passion son vignoble de Larroque qui lui donnait en abondance un vin très renommé. Que les temps sont changés ! Le vignoble actuel ne produit qu’une quantité de vin dérisoire, vin qui n’a pas la moindre ressemblance avec le nectar classique.
  2. Le correspondant de Proché se garda bien de suivre d’aussi excellents conseils et il ne se ménagea jamais. Dans la belle saison il se levait régulièrement à trois heures du matin et, devançant l’aurore, partait aussitôt pour Larroque (son petit-fils dégénéré s’accuse de s’être rarement levé avant quatre heures !) Si l’on me permettait de rappeler ici une petite anecdote, je dirais que mon grand-père, qui était très lié avec son curé, l’abbé Descures, ne manquait pas, en passant devant le presbytère, de frapper de sa canne (au risque d’être accusé du délit de tapage nocturne) les contrevents de la chambre à coucher de son vieil ami, en lui criant : Surge, piger ! c’est le moment de dire Matines ! La chronique ajoute que le vénérable curé, furieux d’être ainsi brusquement réveillé, ripostait à l’interpellation quotidienne par une malédiction non moins quotidienne. Mais la chronique est-elle bien informée ?
  3. Mon grand-père survécut 24 ans à ce souhait affectueux. On voit dans l’acte de décès (Etat Civil de la commune de Gontaud) que Jean Pierre Tamizey de Larroque, propriétaire, ancien officier de cavalerie, fils d’Antoine et de dame Marie-Anne de Massoneau, veut de dame Anne-Germaine Traversat de Montardy (sic), mourut à l’âge de 76 ans dans la nuit du 25 au 26 décembre 1827, vers minuit.