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mot final de la précédente lettre, le mot du cœur, Chapelain dit (25 juin 1662) à son amie (p. 238) : « En portant une partie de vostre fardeau, il me semble que je vous en soulage. »

Nous franchissons quelques années et la situation ne s’améliore pas. Le marquis de Flamarens est toujours exilé et, comme il cherche un refuge en Angteterre, ce refuge même semble devoir lui être enlevé. Ses deux frères mécontentent à l’envi leur parent et protecteur, le maréchal d’Albret. Chapelain, le 26 décembre 1665, écrit ces lignes mélancoliques à l’immuable châtelaine de Buzet (p. 429) :

Je suis bientost à la fin de mon entreprise — [le poème de la Pucelle, puisqu’il faut l’appeler par son nom !] — après quoy je n’auray plus que faire au monde. Il n’en est pas ainsi de vous qui avés une grande famille à soustenir soit pour la défendre contre ses ennemis, soit pour pourvoir à sa subsistance, et si vous veniez à luy manquer, elle tomberoit sans jamais pouvoir s’en relever. Je ne prie aussi le ciel que pour vostre conservation qui luy est si nécessaire ; car pour moy quand je ne seray plus on ne s’apercevra pas de mon absence, et je ne seray pas mort tout à fait estant assuré de vivre tousjours en vostre souvenir.

Bientôt la maladie ajoute ses tortures aux tortures morales dont Madame de Flamarens était victime depuis si longtemps. Chapelain, le 31 juillet 1666, cherche encore à mettre un peu de baume (p. 468) sur cette nouvelle plaie :

J’ay appris que vous estes attaquée d’une fluxion dangereuse qui vous oblige de faire le voyage d’Encausse[1] pour y chercher votre guérison. Je ne vous puis dire le fascheux effet que cette nouvelle a fait en moy. Enfin, Madame, il ne restoit plus que cette espreuve à vostre vertu à essuyer pour estre pleinement assurée de vostre prédestination et d’avoir une heureuse place dans le ciel, après en avoir eu une si malheureuse sur la terre. C’est le seul motif que

  1. Commune du canton d’Aspet, arrondissement de Saint-Gaudens (Haute-Garonne). On se souvient des charmantes pages du Voyage de Chapelle et de Bachaumont sur Encausse (édition Jaunet, 1854, p. 63-71).