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Dans presque toutes les lettres qui suivent, il est question des fils de Mme de Flamarens et presque toujours au sujet de quelque mauvaise nouvelle. Le 21 janvier 1662, Chapelain annonce (p. 194) à la pauvre mère le duel où son fils aîné a été blessé et à la suite duquel il a dû s’enfuir pour éviter la colère du roi (p. 194). « Ce qu’il y a à faire de vostre part, » lui dit-il, « c’est de recevoir cette rude touche avec une constance chrestienne et la soustenir sans abattement afin d’estre en estat d’agir dans cette grande occasion comme vostre qualité de mère et vostre vertu le requièrent, dont vous avés à rendre compte au public aussi bien qu’à vostre bon cœur. »

De nouveaux ennuis viennent bientôt (2 avril 1662) accabler Mme de Flamarens. Elle eut à soutenir, elle dont le cœur était déjà si endolori, deux luttes bien pénibles, une contre son fils aîné, qui voulait faire un mariage indigne de sa condition, l’autre contre la mère de son mari, qui paraît avoir été la plus détestable des belles-mères. Laissons la parole à Chapelain (p. 218) :

Madame, Dieu continue à vous exercer sans doute et très rudement, mais il ne vous laisse pas la liberté d’en murmurer, estant le maistre et n’y ayant jamais rien d’injuste en ses volontés. C’est la voye du ciel qu’il vous oblige de suyvre, pénible et espineuse dans son estendue, mais douce et heureuse dans sa fin. Fortifiez-vous de cette espérance et vous servés pour cela de cette vigueur d’esprit dont il vous a pourveu dès votre naissance et qui vous a fait sortir jusqu’icy de tant de mauvais pas. Si vous vous soumettés à ses ordres, il vous en fournira une nouvelle et vous aidera à vous tirer encore de ceux cy. Monsieur vostre fils en use sans doute mal de considérer si peu son devoir et votre satisfaction dans cet engagement qui vous donne tant d’inquiétudes. Mais il est jeune et ce seroit une espèce de miracle si, dans le bouillon de l’âge et au milieu de tant d’objets séduisans[1], il s’en défendoit comme il devroit

  1. Chapelain rend ici un galant hommage à la beauté des Espagnoles. Le fils aîné de la marquise de Flamarens avait été obligé, pour éviter la rigueur des lois contre le duel, de franchir les Pyrénées. On voit qu’il n’avait pas tardé à subir le charme dont parle Chapelain.