Page:Tamizey de Larroque - La Messaline de Bordeaux.djvu/12

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 8 —

« Qui a veu la statue de ladite Messaline trouvée ces jours passez en la ville de Bourdeaux, avouera qu’elle avoit bien la vraye mine de faire une telle vie[1]. C’est une médaille[2] antique, trouvée parmy aucunes ruines, qui est très belle, et digne de la garder pour la voir et bien contempler. » Le chroniqueur périgourdin se livre ensuite à diverses considérations d’esthétique et de physiologie au sujet de cette « fort belle femme, de très belle haute taille, » des « beaux traits de son visage, » de « sa coiffure tant gentille à l’antique romaine. » J’y renvoie le lecteur qui ne redoute pas les gauloiseries du xvie siècle, et je me tourne vers un autre admirateur de la Messaline de Bordeaux.

Cet admirateur est le voyageur allemand Zinzerling, plus connu sous le nom de Jodocus Sincerus. On n’ignore pas qu’il s’est occupé avec la plus vive sympathie de la capitale de la Guyenne dans un chapitre particulier annexé, sous le titre de : Appendix de Burdigala, à son Itinerarium Galliæ[3]. Zinzerling ne pouvait manquer de célébrer les monuments retrouvés en 1594, puisque, comme il le déclare lui-même, il obtint force renseignements du fils de Gabriel de Lurbe[4], et ce fils dut assurément placer entre

  1. La vie stigmatisée par Juvénal, dans des vers dont la brûlante verve n’a jamais été dépassée.
  2. Je suppose qu’ici médaille est un lapsus calami, le mot statue employé par Brantôme ne permettant pas de croire qu’il ait voulu parler d’autre chose que de l’objet en marbre qui figure dans les deux récits de G. de Lurbe.
  3. Éditions de Lyon, 1616. in-12, et 1626, in-12. La première édition de l’Itinerarium est de Lyon 1612. Dans l’avant-propos de l’Appendice, Zinzerling applique à Bordeaux le célèbre mot d’Horace : Ille terrarum mihi prœter omnes angulus ridet. Comment cet érudit a-t-il été oublié par M. de Verneilh dans sa très intéressante étude sur les anciens Voyageurs à Bordeaux (Recueil des Actes de l’Académie nationale des Sciences, Belles-Lettres et Arts de cette ville, 41e année, 1879, p. 1-44.) Un archéologue tel que M. de Verneilh aurait tiré le plus heureux parti des descriptions bordelaises de Zinzerling.
  4. Weiss, dans l’article Zinzerling de la Bibliographie universelle, prétend que le voyageur reçut des renseigaements de Florimond de Raymond.