Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 3.djvu/83

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de Rohan la mère demanda qu’il fût nommé deux arbitres de chaque côté, l’un de robe, et l’autre d’épée, et cela, afin que ces personnes de qualité jugeassent des difficultés que feroient les avocats, qui souvent, disoit-elle, en font de fort inutiles.

Trois jours après, le même gentilhomme retourna assurer madame de Rohan de tout ce qu’elle avoit proposé ; mais quand ce fut au fait et au prendre, ils n’exécutèrent rien ; dont la bonne femme se plaignit à la Reine, et se soumit, à en croire M. le Prince, au moins pour le bien. Pour la reconnoissance de son fils, elle disoit que ce n’étoit point une affaire d’animosité, mais une pure nécessité de ne pas demeurer dans le crime de supposition dont elle a été accusée ; car, sur cela, on lui pourroit faire perdre son douaire.

Depuis, elle demanda qu’on lui laissât enterrer Tancrède à Genève avec son père, et qu’elle feroit les frais du tombeau et de l’épitaphe de son mari, dont sa fille s’étoit chargée. La cour promit d’être neutre en cette affaire ; elle espéroit donc d’obtenir tout ce qu’elle voudroit de la république de Genève, quand à Bordeaux on trouva moyen d’obtenir une lettre du Roi, adressée aux seigneurs de Genève, fort injurieuse pour elle. Au retour de Bordeaux, elle en donna copie à Ruvigny, qui, avec madame de Chevreuse, qu’il fit agir, pressa fort le cardinal d’en parler à la Reine. Il vétilla, disant toujours qu’il ne savoit ce que c’étoit : la Reine le nia aussi. Brienne dit que si on le faisoit parler, il diroit qu’il avoit signé cette lettre. La bataille de Rethel vint là-dessus, et ensuite toute la seconde guerre de Paris. Depuis, madame de Rohan les fit rechercher d’accord avec le prince de Guémené.