Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 3.djvu/79

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

le canon. Depuis, il avoit fort bien vécu avec lui. M. de Rohan, au lieu de dire qu’il accordoit tout à la prière de M. le maréchal, demanda vingt-quatre heures. Le maréchal crut que durant ce temps-là il vouloit cabaler contre Cossé. Il lui envoya Marigny-Malnoë, sur l’heure du dîner, qui aigrit un peu les choses, car il pressa fort, selon l’ordre qu’il avoit, de demander à M. de Rohan sa voix sur-le-champ, qui ne la voulut point donner. Le maréchal, dès l’après-dînée, fit présider Cossé sur une prétention mal fondée que ceux de Brissac ont renouvelée.

Depuis le support du maréchal, M. de Rohan n’eut ni l’esprit ni le cœur d’aller se présenter seul à la porte des États, pour, s’il étoit refusé, prendre la poste et venir faire ses plaintes à la cour. Non content de cela, le maréchal le chassa de Nantes. Madame de Rohan lui chanta pouille, et lui dit qu’il maltraitoit une personne d’une maison où c’est tout ce qu’il auroit pu prétendre que d’y être page. Le marquis d’Asserac, si je ne me trompe, et un autre accompagnoient madame de Rohan : c’étoient des braves, des gladiateurs. Asserac pensa dire que s’il n’étoit maréchal de France, il étoit du bois dont on les faisoit. « Vous avez raison, lui répondit le maréchal, quand on en fera de bois, je crois que vous le serez. »

Cossé fut dépêché comme député à la cour. En partant, il fit dire par La Piaillière, capitaine des gardes du maréchal, à un brave, nommé Fontenailles, que Chabot avoit mené avec lui, que si M. de Rohan avoit quelque mal au cœur de ce qui s’étoit passé, M. de Cossé s’en alloit à Angers, et seroit six jours en chemin exprès, afin qu’on le pût joindre facilement. Cela dé-