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venger envoya saisir tous ses bestiaux. Le chevalier s’en voulut ressentir, et M. de Chabot ayant passé à Saintes, il lui fit porter parole. Chabot la reçut, et alla au rendez-vous, car il avoit bien besoin de se mettre un peu en réputation. Il blessa le chevalier légèrement à la main ; mais les deux seconds, qui étoient de braves gens, se tuèrent tous deux. J’ai ouï dire à d’autres que Chabot avoit seulement prêté main-forte pour faire saisir la terre de ce gentilhomme.

Chabot vint après à la cour, où, trouvant M. d’Enghien de retour de Dunkerque, il le supplia de lui témoigner sa bienveillance dans le démêlé qu’il étoit sur le point d’avoir avec M. de Trimouille. M. d’Enghien lui répondit : « Dans vos affaires particulières, je vous servirai toujours comme j’ai fait, mais je ne le puis ni ne le dois, quand vous vous attaquerez à mes parents ; au contraire, je les saurois bien maintenir. » Sa grand’mère étoit de La Trimouille. Depuis, cette affaire s’accommoda, et en 1647 M. de Rohan présida. M. de La Trimouille prétend avoir donné cela à la prière de M. d’Enghien ; car il étoit de fort grande importance à M. de Rohan de présider cette année-là : mais il n’y eut pas toute la satisfaction imaginable ; car, comme il fut question de députer à l’ordinaire, pour apporter le cahier à la cour, on trouva bon de faire faire le compliment qu’on devoit à la Reine, en qualité de gouvernante, par celui qui seroit député. Cossé, cadet de Brissac, voulut avoir cet emploi, et lui fit demander sa voix de la part du maréchal de La Meilleraie, à qui il avoit obligation ; car le maréchal, à la prière de M. le Prince, l’avoit été recevoir à une demi-lieue hors la ville (c’étoit à Nantes), et avoit fait tirer