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appelé fils de p..... et enfant trouvé, il se battit fort et ferme, et il disoit qu’il se souvenoit bien d’avoir été en carrosse.

Tous ceux du côté de Béthune, et même le maréchal de Châtillon, comme ami de feu M. de Rohan, furent pour Tancrède ; cela fit tort à cet enfant, car la cour ne vouloit point qu’il y eût un duc de Rohan huguenot.

À Charenton, il y avoit toujours une foule de sottes gens autour de ce garçon. Joubert fut chargé de la cause ; il y eut un incident à savoir si ce seroit à la chambre de l’édit ou à la grand’chambre ; on plaida au conseil. Dans le Louvre, l’avocat prit la chose si fort de travers, lui qui s’étoit vanté de faire un duc de Rohan sur le barreau, qu’on douta, mais on lui faisoit tort, s’il n’étoit point corrompu, car il avoit un gendre, Piles, cousin de Chabot. Il n’avoit pas eu assez de temps ; il falloit lui laisser lécher son ours. Ordonné donc que ce seroit à la grand’chambre, madame de Rohan n’y comparut point. M. d’Enghien prit l’affirmative si hautement pour Chabot, qu’il disoit aux juges : « Êtes-vous pour nous ? Si vous n’êtes pour nous, vous n’êtes pas de nos amis, » et les menaçoit quasi. On donna arrêt contre Tancrède, avec défense de prendre le nom de Rohan, sur les peines de l’ordonnance.

Dans la vision de prendre tous ses avantages, on conseilloit à Chabot de faire crier cet arrêt à Charenton ; c’étoit, je pense, Martinet, un des avocats ; mais Patru s’en moqua. Gaultier eut l’insolence de dire qu’il falloit aller jusqu’au bout, et que mors Conradini étoit vita Caroli.

On imprima les trois plaidoyers ; les deux premiers