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épousa l’aînée ; l’autre fut mariée au prince d’Enrichemont, fils du marquis de Rosny, aîné de M. de Sully, mais qui étoit mort il y avoit long-temps. Ce M. d’Enrichemont est une contemptible créature ; le bon homme de Sully eut de la peine à s’y résoudre, et disoit : « Je ne veux point m’allier avec le prince des chicaneurs. » En quelque occasion le chancelier lui écrivit, et il y avoit en un endroit : Afin que la paix soit dans nos familles. « Familles ! dit le bon homme, familles ! Bon pour lui qui n’est qu’un citadin ; mais il pourroit bien user du terme de maison, quand j’y suis compris. » La chancelière étoit ravie de dire : « Allez savoir comment ma fille la princesse a passé la nuit. » Avant cela il fut assez fou pour aller proposer au cardinal, comme si sa femme l’y avoit obligé, de marier sa fille avec feu M. de Nemours, l’aîné de celui que M. de Beaufort tua. « Oui, lui répondit le cardinal ; en effet, cela seroit fort sortable que Victor-Amédée de Savoie épousât Charlotte Séguier ! dites à Marie Fabri qu’elle rêve. »

Quelque avide de louange que fût le chancelier, tandis que le cardinal de Richelieu a vécu, il n’a pas voulu souffrir qu’on le louât, et il se fit de l’Académie, de peur qu’on ne dît qu’il se vouloit tirer du pair[1]. Depuis, quand l’abbé de Cerisy[2] se retira à l’Oratoire,

  1. Bois-Robert dit qu’il avoit proposé au cardinal de faire le chancelier protecteur, et de se contenter, lui, d’avoir soin de l’Académie, et que le cardinal, qui prenoit le chancelier pour un grand faquin, reçut cela si mal, qu’il pensa chasser Bois-Robert. (T.)
  2. Germain Habert, abbé de Cerisy, de l’Académie françoise, mort