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L’abbé de Lenoncourt, le marquis présentement, se mit un jour à la railler fort sottement. « Monsieur, lui dit-elle, avez-vous été condamné par arrêt du parlement à faire le plaisant ? car, à moins que de cela, vous vous en passeriez fort bien. »

Une fois madame de Chaulnes, la mère, lui dit quelque chose qui ne lui plut pas. « Si vous ne me traitez comme vous devez, lui dit-elle, je ne mettrai jamais le pied céans. Je n’ai que faire de vous ni de personne : Robert Pilou et moi avons plus de bien qu’il ne nous en faut. À cause que vous êtes duchesse, et que je ne suis que fille et femme de procureur, vous pensez me maltraiter ; adieu, madame, j’ai ma maison dans la rue Saint-Antoine qui ne doit rien à personne. » Le lendemain madame de Chaulnes lui écrivit une belle grande lettre, et lui demanda pardon.

Quand M. de Chavigny alla demeurer à l’hôtel de Saint-Paul, il trouva madame Pilou quelque part et lui dit : « Madame, à cette heure que je suis votre voisin, je prétends bien que vous me viendrez voir. » Elle y va ; mais elle ne fut point satisfaite de lui : il fit assez le fier. Depuis cela, dès qu’il étoit en un lieu elle en sortoit. Enfin, à je ne sais quelles accordailles, chez M. Fieubet, au fort de sa faveur, il vit qu’elle s’étoit allée mettre à l’autre bout de la chambre ; il alla à elle fort humblement, et lui dit qu’il vouloit être son serviteur. « Monsieur, répondit-elle, je ne suis qu’une petite bourgeoise, vous êtes un grand seigneur, vous ne m’avez pas bien traitée, vous ne m’y attraperez