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LE PÈRE ANDRÉ[1].


Le Père André, augustin, vulgairement appelé le Petit Père André, étoit de la famille des Boullanger de Paris, qui est une bonne famille de la robe. Il a prêché une infinité de Carêmes et d’Avents ; mais il a toujours prêché en bateleur, non qu’il eût dessein de faire rire, mais il étoit bouffon naturellement, et avoit même quelque chose de Tabarin dans la mine. Il parloit en conversation comme il prêchoit.

Il y tâchoit si peu, que quand il avoit dit des gaillardises, il se donnoit la discipline ; mais il y étoit né, et ne s’en pouvoit tenir. Comme il prêchoit un Avent au faubourg Saint-Germain, feu M. de Paris, à cause de je ne sais quelle cabale de moines dont il étoit des principaux, et aussi pour le scandale que ses bouffonneries donnoient, l’envoya quérir et le retint en prison à l’archevêché. M. de Metz[2] s’en formalisa, disant « que M. l’archevêque ne pouvoit faire arrêter un religieux qui prêchoit dans un faubourg qui dépendoit de l’abbaye de Saint-Germain ; » et effective-

  1. André de Boullanger, dit le petit Père André, mourut en 1657.
  2. Henri de Bourbon, duc de Verneuil, fils naturel d’Henri IV, évêque de Metz, abbé de Saint-Germain-des-Prés en 1623. Il abdiqua en 1669 en faveur du roi Casimir.